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Extrait d'un article paru dans le bulletin fédéral (FFS) " Info-Plongée " n°70, p.9-11, 1996.
Quelque part sous la limite administrative ente le Gard et l'Ardèche, la rivière Claysse disparaît sous terre, dans la Goule de Sauvas qui l'absorbe intégralement. La rivière réapparaît à l'air libre quelques kilomètres plus au sud, grossies de nombreux affluents souterrains interconnectés, qui totalisent plus de dix kilomètres de galeries souterraines. Le 13/09/1892 Gabriel GAUPILLAT, un pionnier de la spéléologie locale, suivait et topographiait le conduit jusqu'au premier siphon de la Goule de Sauvas. Au début des années soixante (1962?), Robert LACROUX réalisait d'audacieuses plongées dans le siphon terminal, pour sortir dans trois cloches d'air sans continuation "Actuellement de nouvelles plongées me conduisent à errer dans une immense salle noyée dont je n'arrive pas à trouver la sortie...". Le siphon terminal (Sg1), à 400m de l'entrée de cette superbe cavité, fut franchi en 1971 par quatre plongeurs du Groupe Rhodanien de Plongée Souterraine (69). Ils exploraient ensuite 700m de vastes conduits exondés jusqu'au Sg2 passé lequel ils allaient s'arrêter sur un siphon (le siphon Marie en 1977), puis jonctionner avec la grotte de la Cocalière en 1978, à partir de cette cavité. Juste avant le second siphon, une galerie de moindre importance était également parcourue jusqu'à un nouveau siphon, supposé à juste titre être en rapport avec l'évent de Peyrejal. A la requête du S.C. des Vans, le C.L.P.A. (34) poursuit en 1972 dans cette branche. Un siphon est passé ainsi que cinq voûtes mouillantes suivis de 200m de conduites forcées "typiques de Peyrejal". Arrêt sur un nouveau siphon "la lacune serait de 50m au grand maximum avec l'évent de Peyrejal". Jean-Marie CHAUVET et B.LEGRAND (SC.Vans-07) plongent ce siphon (Sg3: 80m;-7) le 07/03/1981, enchaînant avec 15m exondés avant de trouver un troisième (Sg4: 20m;-1) suivi de 70m jusqu'au quatrième, diaclase argileuse et plongeante reconnue sur 15m (-4). Côté Peyrejal, dans la branche dite "de Sauvas" quatre siphons (Sp1 à Sp4) ont été franchis (G.R.P.S. 03/08/1973) pour buter sur une voûte mouillante surmontée d'une trémie. Le 21/02/1983, CHAUVET et MONTANE (S.C.Vans) passent l'obstacle aquatique et chaotique pour buter, après 40m de galeries confortables (4X4m) sur un colmatage de galets, jugé aisément désobstruable. Dans le cadre de l'étude menée sur la cuvette de Saint-André de Cruzières par Michel CHABAUD et dans la suite logique des récentes explorations effectuées sur ce secteur, nous décidons de tenter une nouvelle fois cette jonction entre la goule de Sauvas et l'évent de Peyrejal. Le 09/04/1995, nous nous retrouvons à l'entrée de la goule, bénéficiant d'une météo exceptionnellement stable pour la saison. Les 400 premiers mètres, agrémentés d'un P.4 à 150m de l'entrée et d'un ressaut de 3m un peu plus loin (amarrage sur cerclage de tonneau concrétionné), sont rapidement parcourus jusqu'au Sg1. Peu avant ce dernier, nous contemplons la forêt de glands germés qui fait suite à un court laminoir. Quelques pneus encastrés çà et là entre les blocs rappellent la puissance des crues dans ce réseau qui se met en charge quasi-intégralement. Le premier conduit noyé Sg1 (35m;-2) est vaste et confortable, ponctué de cloches d'air et peuplé de sympathiques poissons dont certains sont dépigmentés. Nous le reéquipons pour accéder à une modeste vasque de sortie depuis laquelle il faut consentir une escalade de 2m. Après 50m de progression dans une imposante galerie, certains d'entre nous sont incommodés par le gaz vicié (matières en décomposition?) qui demeure sensible durant environ 150m, jusqu'à une descente au sein d'un chaos de blocs. Les lampes acétylènes poussives éclairent à peine le triste spectacle de spéléos suffocants et souffreteux, peinant à l'effort et lents à la récupération. Puis le conduit devient grandiose et varié, spacieux et esthétique, harmonieusement corrodé. Un départ latéral en rive gauche, non signalé lors des précédentes publications, est reconnu jusqu'à un rétrécissement affecté d'une voûte mouillante. A 700m du S.1, le conduit est graduellement comblé de galets, et c'est en progressant courbé que nous atteignons le siphon (Sg2: 12m) par lequel on s'oriente vers la grotte de la Cocalière. Quelques mètres avant cette vasque, un conduit bas s'engage vers l'Est. Jean-Marie CHAUVET nous avait parlé d'une conduite forcée de 2x3m, sans difficultés particulières. C'était sans compter avec la puissance des dernières crues et l'alluvionnement considérable des conduits. Il faudra consentir 200m de reptation dans une galerie étriquée (h=1m à 70cm, l=1,5m) et aquatique, ponctuée de deux voûtes mouillantes. Il n'y a pas de circulation d'air et la présence de végétaux et détritus divers, que l'on souhaiterait anachronique en ces lieux, explique certainement les difficultés respiratoires qui nous affectent à nouveau. A l'entrée du premier siphon de cette branche (Sg3) nous ne sommes plus que deux, bénéficiant de l'aide de Gilles et Régis pour acheminer le matériel. Ici, des flacons pharmaceutiques flottent à la surface de la vasque, remplis de liquides interlopes aux couleurs ineffables. D'autres, brisés, dardent d'inquiétants goulots acérés au travers des galets. Sale ambiance pour les quadrupèdes... La vasque, bordée d'un important talus glaiseux, plonge rapidement vers un sol de galets. Dans la descente, des matières en décomposition d'aspect foliacé s'épanouissent en troublantes volutes et nous accompagnent jusqu'au point bas. Le siphon est bas (h=1m), partiellement alluvionné. Il accuse, dans sa partie terminale, de brusques variations de profondeur à la faveur d'impressionnantes pentes de galets amoncelés. L'interstice entre la voûte et les blocs autorise tout juste le passage du plongeur, léger sur les palmes, l'humilité est de rigueur ! Par endroits, des branches enchevêtrées barrent le passage, éléments rapportés attestant de la puissance des crues. Des lambeaux de fil gisent çà et là, dérisoires pelotes sur lesquelles se sont agglutinées des feuilles, formant d'antipathiques guirlandes. Après 75m de progression à ce régime (point bas -7), on émerge dans une courte galerie gazée (10m) pour rejoindre le Sg4 dans lequel le fil est demeuré intact. Après 20m à -1, il s'enfile subitement dans un colmatage de galets. Sur la gauche, un tricounis de branchages interdit l'accès à une modeste surface, passée laquelle le Sg5 avait été vu sur 15m. Impossible de progresser au-delà sans une désobstruction subaquatique engagée ou un acrobatique décapelage. Modestes dans nos petites palmes, nous battons en retraite, déçus d'avoir été stoppés si près du but. Retour rapide jusqu'au Sg2, par un conduit embrumé et gazé à souhait, pour retrouver Gilles endormi dans les grandes galeries et amorcer le retour vers la sortie. La jonction n'aura pas été pour cette fois, mais demeure un objectif réaliste, dans la mesure où le hiatus entre les deux cavités est de l'ordre de quelques dizaines de mètres. Il faudra réitérer les tentatives après les crues importantes dont le pouvoir de remaniement demeure un élément aux effets imprévisibles (comblage ou déblaiement). Des modifications d'ampleur égale avaient déjà été constatées par J.M. CHAUVET côté Peyrejal. Ayant fait une reconnaissance dans des conduits confortables jusqu'aux siphons (Sp2), il avait du, le jour de la pointe, ramper sur les galets rapportés qui avaient comblé le conduit presque intégralement. Frank Vasseur |