Depuis la prise (reprise pour certains) de contact fin janvier 2005,
nous ambitionnons la poursuite de l’exploration de la Fontaine de Nîmes.
Non plus depuis la célèbre vasque, sise dans les jardins municipaux du
centre ville, mais par le «Puits poubelle », au patronyme nettement
moins enjôleur.
A la fin des années 90, les topographies levées par les spéléos durant
les pompages, raccordées à celles des plongeurs, sont reportées en surface.
La zone terminale (le laminoir atteint par Patrick Penez au milieu des
années 80) passe à proximité d’un point d’eau pointé sur la carte.
Ce regard est situé sous la ville, au nord-ouest de la vasque. Il a été
intégralement nettoyé des immondices et détritus divers qui comblaient
ses 17m de hauteur. Plusieurs désobstructions ouvrirent ensuite un
passage immergé, raccordé immédiatement au siphon connu, juste avant le
terminus des explorations, dans un laminoir difficile.
C’est par là que le pompage de 1998 sera organisé, ainsi que toutes les
pointes suivantes en plongée.
Samedi 8 et dimanche 9 avril, activité inhabituelle autour du puits.
Une série de plongées devrait récompenser l’investissement de toute une équipe depuis mars 2005.
Depuis un peu plus d’un an, nous avons consacré 8 sorties au
reéquipement intégral (en cablette inox gainée) et au nettoyage du
cheminement principal du S.2 amont (985m ;-42), ainsi qu’à la
topographie détaillée des 720 derniers mètres.
L’intégralité des galeries connues dans la Fontaine sont à présent
topographiées, soit un peu moins de 6000m mètres.
Ces précautions, si elles sont dictées par le souci de relever une
topographie à peu près valable, se justifient également du fait de
certaines particularités non négligeables de cette émergence :
- l’eau est polluée et non potable
- la visibilité moyenne avoisine généralement 2 mètres, atteint
exceptionnellement 3 à 4 m toujours dans une atmosphère d’infusion;
- la réputation de sinuosité de la galerie n’est pas surfaite. Elle se
combine à un profil en yo-yo (9 points hauts dont trois passages en
surface). Il est illusoire d’envisager la mise en œuvre de propulseurs ;
- toutes les parties aériennes sont particulièrement gazées (limite
respirable pour certaines selon les périodes) ;
- la source témoigne d’une réelle réactivité aux précipitations. Les
crues sont fréquentes et dévastatrices. Le fil d’Ariane ne tient pas une
crue, il est « délicat » d’entreposer du matériel (dévidoirs,
bouteilles…etc) au risque de le savoir en goguette quelque part dans les kilomètres de galeries aval;
- les eaux sont corrosives, au point d’attaquer les parties métalliques
des dévidoirs et de décaper les chromes des robinetteries et détendeurs
(lors de séjours prolongés);
-
- le courant est omniprésent. Sa puissance peut s’avérer rédhibitoire
(limite plongeable à 350 litres par secondes mesurés au débouché des
jardins de la Fontaine).
Descriptif succinct
On accède au siphon par le « puits poubelle », un regard situé à un peu
plus de 1000m de la vasque de la Fontaine, en bordure de l’ancienne
route d’Alès.
Au bas de ce puits de 17m, un premier siphon au départ étroit, d’une
cinquantaine de mètres, émerge dans un lac gazé.
La galerie « des chailles », une belle vacherie, est courte (26m), mais
mémorable. On y progresse à 4 pattes, bouteilles au dos, dans une
atmosphère difficilement respirable (franchissement détendeurs et
embouts en bouche) jusqu’à une ressaut de 2m.
Là débute le S.2 (985m ;-42), exploré suite à des pompages, puis en
plongée, dont la dernière date de 2003.
voir récit de serge Gilly
Il débute par une galerie affectée de nombreux yo-yo sur les 530
premiers mètres. Une fracture dégringole ensuite à –42, puis on remonte
en suivant un net pendage, dans une jolie conduite forcée où le courant
est très sensible.
Après un point haut à –7m, un puits plonge à nouveau à partir de 850m.
On passe alors à –22 pour remonter dans une galerie plus modeste, à la
section plus irrégulière (étirée en hauteur) et tapissée de dépôts
argileux.
« Pointe » du 9/04/2006
Le débit de la Fontaine ce dimanche était faible, 150-160 l/s. La «
limite » est évaluée à 350 l/s. Au-delà, il est quasi impossible de
progresser durablement à contre-courant.
La veille, cinq plongeurs ont transporté 6 bouteilles dans le S.2,
déposées jusqu’à 560m, ainsi qu’un dévidoir de cablette métrée + une
trentaine de caouèches et le matos topo (compas Silva et carnet).
Aujourd’hui, deux plongeurs équipés de recycleurs à circuit fermé
rejoignent le terminus du reéquipement / topo (850m ;-8).
Après un point bas à –24, ils poursuivent jusqu’à un point haut à
–11terminus du fil, après deux rétrécissements ponctuels.
Là, visibilité se dégrade très rapidement malgré l’absence de bulles
expirées par les plongeurs.
En plongeant dans une puissante fracture, ils atteignent le fond d’une
petite salle argileuse sans prolongement évident, ni indice de circulation.
Ils reviennent sur leurs pas pour s’engager dans une modeste galerie
repérée à l’aller. Au bout de 6m, elle débouche dans une salle noyée à
–14 dont le fond se trouve à –22 …. Sur leur précédent terminus.
Deux fois dans la touille. La visibilité, dégradée, confirme l’absence
de courant.
Une petite trentaine de mètres de première.
En revenant, ils inspectent les parois da la galerie jusqu’au point bas
de –39, sans rien trouver d’autre que des amorces de conduits impénétrables.
Sauf en plafond qui demeure indiscernable (touille descendante malgré le
peu de bulles expirées durant la remontée).
Puis s’en retournent dépités en ramenant les 6 bouteilles jusqu’au début
du S.2.
Plongée de 161 minutes dans le S.2 avec du trimix à 35%, dont une petite
dizaine de minutes de décompressions (aller et retour).
Pendant ce temps, un plongeur peaufinait le rééquipement du début du S.2
pour recaler les distances et les topos.
A leur sortie, quatre plongeurs s’engagent illico dans le puits pour
refaire passer toutes les bouteilles dans la galerie « des chailles »,
et rapatrier le tout jusqu’à la surface.
Nous allons prendre le temps de mettre au propre les topos, de les
reporter sur carte afin de trouver quelques « pistes » pour la prochaine
plongée, certainement en fin d’année.
Il est également question de revoir en détail la zone entre 300 et 550m,
qui pourrait révéler des surprises (un départ de galerie et une cloche
découverts cette année).
Il est évident que les 25 m3 débités en crue par la Fontaine passent
bien quelque part. L’étude des paramètres géologiques de la zone sur
laquelle nous butons est en cours.
On va prendre le temps de souffler un peu, mais certainement pas se
laisser abattre.
Gilbert Jouanen et Dédé Coste n’ont pas « lâché » non plus :
« Après un peu de réflexion, un peu de discussion avec André, et une
petite promenade dans la rue Ravel et le chemin du Quartier d'Espagne,
quelques conclusions viennent à l'esprit.
Tout d'abord, si tu te souviens de notre visite sur le terrain dimanche,
tu as pu remarquer la forte déclivité qu'il y a entre la rue Ravel et le
chemin du Quartier d'Espagne. En fait, nous changeons de formation
géologique sur cette ligne Est-Ouest. A partir de la rue Ravel, et en
direction du Nord (bois des Espeisses), nous trouvons de l'Hauterivien
inférieur (calcaires et calcaires marneux) alors que jusque-là le réseau
se développe dans l'Hauterivien supérieur (calcaires cruassiens).
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De
plus j'ai remarqué lors de ma visite de ce soir, quelques affleurements
sur le chemin du Quartier d'Espagne qui montrent des couches verticales de calcaires marneux légèrement inclinées Nord-Sud vers
la rue Ravel (accident géologique).
Je ne suis donc pas étonné maintenant sans trop m'avancer que vous soyez
tombés sur une morphologie quelque peu différente du reste du réseau.
Il me paraît donc peu probable que la suite du réseau soit en direction
du Nord à cet endroit. Mais il faudra que j'en parle à André.
D'un avis commun, un réseau comme la Fontaine qui s'arrête comme ça cela
paraît, vous en conviendrez, illogique. On a manqué obligatoirement
quelque chose quelque part. La partie terminale que vous avez reconnue
n'est sûrement sollicitée que lors des crues. Pour un débit de 20 à 24
m3/s, il faut de grosses galeries. Pour info : un débit de 20 m3 qui
circule à la vitesse vertigineuse de 15 km/h (impensable sous terre) il
faut une galerie régulière minimum de 2,40 m par 2,00 m. D'autant qu'il
n'y a pas d'autre grosse arrivée d'eau ailleurs. Gardons espoir.
On se trouve face à une faille pincée de calcaire marneux (illustration
jointe).»
Participants à cette campagne de plongées
- En surface et aux transferts (ascendants et descendants) dans le puits
:
Yves André, André Coste, Gilbert Jouanen, Marceau Lacroix, Roger et
Jeanine Reboul, Christian Velay, Michel Wienin
- Sous l’eau : Stéphane Alleguede, Cédrik Bancarel, Romuald Barré,
Jean-Marc Belin, Régis Brahic, Mehdi Dighouth, Yannick Genève, Claude
Gilly, Denis Grammont, Richard Huttler, Kino Passevant, Jérôme Martin,
Laurent Mestre, Christian Moreau, Guillaume Tixier, Frank Vasseur,
Damien Vignoles.
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Merci tout particulièrement à :
- l’Association Fontaine De Nîmes (A.F.D.N.
http://compo.free.fr/fontaine), maître d’œuvre de ces plongées, pour tout le travail effectué sur cette source majeure et son soutien matériel (dévidoirs, cablette), et tout particulièrement Dédé Coste et Gilbert Jouanen ;
- Serge Gilly pour ses encouragements, les données et descriptifs concernant ses précédentes explorations ;
- Jérôme Martin, as du bricolage, pour ses éclairages et la remise enétat de nos artefacts divers ;
- La société Barbolight (http://www.barbolight.com) pour son soutien et ses éclairages de qualité, notamment les verts, parfaitement adaptés aux mauvaises conditions de visibilité ;
- Nicolas et Eric Schalk, du magasin Procéan de Biarritz
(http://www.procean-plongee.com) pour leur aide et leurs conseils,
- La société Topstar (http://www.topstar.fr) pour ses vêtements secs et humides dont nous sommes inconditionnels ;
- La société Pgaz de Juvignac (34) pour ses facilités et ses tarifs sur les gaz ;
- Aldo Ferrucci (http://www.bubnotbub.com) pour ses conseils et son soutien technique dans le domaine des recycleurs.
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Christian sortant du puits poubelle, par Jérôme Martin
Richard Huttler aux amarres, par Mhedi Dighouth
Denis sortant du puits poubelle, par Jérôme Martin
Jean-Marc sortant du puits poubelle, par Jérôme Martin
Régis sortant du puits poubelle, par Jérôme Martin
par Yves André
Denis Cro-mignon, par Mehdi Dighouth |