LA FONTAINE DE NIMES
EXPLORATION RESEAU NORD 2002
(Frédo POGGIA, Laurent TARAZONA)
1- PREAMBULE
Dans le jardin public de Nîmes, en contrebas de la tour
Magne, la fontaine laisse s'écouler ses eaux claires. La vasque d'entrée,
de 10 mètres de diamètre, est entourée de deux hémicycles
datant de l'époque romaine et quelques marches permettent d'accéder
au bord de l'eau.
C'est au fond de cette vasque, à 10 m de profondeur, qu'une pente de
galet et un passage bas livrent l'accès à un réseau souterrain
de grande envergure.
Ce réseau s'articule en deux branches : le réseau Ouest et le
réseau nord.
Dans le réseau ouest, la récente découverte du "
puits poubelle ", permettant un accès à la fin du réseau
connu en plongée à permis de relancer les explorations qui se
poursuivent encore à aujourd'hui.
Le réseau Nord après un S1 de 1200m pour -43m est constitué
d'un actif parsemé de petits siphons : S2(15, -2), S3 (65, -10), S4
(10, -4), S5 (15,- 5). Le terminus établi par F. POGGIA en 1980 se
situait dans le S6 à 1900m de la vasque d'entrée.
Toutes les explorations menées sur le réseau sont pilotées par l'Association Fontaine de Nîmes qui gère entre autres les relations avec la municipalité et garantit une entente cordiale avec le milieu de la spéléologie.
2- EXPLORATION 2002
Après une tentative d'exploration avortée pour
cause de mauvaise météo sur la résurgence de Goule Noire
dans le Vercors, nous décidons d'aller " sévir " sous
des cieux méridionaux à priori plus propices à notre
passion.
Voilà 22 ans que Frédo voulait retourner à son terminus
de la fontaine de Nîmes. Nos explorations de l'an passé à
la grotte de la Balme (Isère) ayant soudé notre binôme,
c'est avec enthousiasme que nous programmons ce nouvel objectif.
Avant toute chose, pour garantir la sécurité des
plongées, il nous faudra vérifier ou ré-équiper
le premier siphon. Nos disponibilités réciproques étant
limitées, Frédo ouvre le bal tout seul et vérifie l'équipement
du S1 jusqu'à 750. Pas de problème majeur, il faut dire toutefois
que le S1 avait été ré-équipé en partie
en 1997 par les plongeurs de CELADON .
Deux semaines plus tard, avec Christophe LAJOUX, nous partons en Bi 18l et
2 relais de 10L et allons jusqu'à 1050 m.
Visiblement, le fil de la première était de bonne qualité
car il est toujours en place.
Après ces quelques préliminaires, nous allons donc pouvoir envisager
les choses sérieuses.
Pour mener à bien cette exploration, nous envisageons de faire la pointe avec un bi 4 litres et un relais de 3 litres avec un NITROX 70%, ce relais nous permettra de franchir le S3, S4 et S5 et de se " rincer " régulièrement les poumons dans les galeries où règne un très fort taux de CO2.
La première plongée en binôme sera donc effectuée mi-avril pour porter nos bi 4 derrière le S1 ainsi que du matériel divers (corde, boisson énergétique, nourriture). En outre, cette plongée nous permet de tester les propulseurs dans les galeries où la visibilité est parfois réduite (2 à 3 m dans le réseau nord).
Le mois de mai sera peu propice à notre exploration finale : pluies régulières mettant la fontaine en crue, feria de Nîmes nous interdisant l'accès à la vasque .finalement, ça ne sera que le 2 juin que nous pourrons faire notre pointe.
Malgré la journée de l'environnement qui a fait fleurir les stands de toutes sortes dans le parc de la fontaine, nous nous retrouvons ce matin à 9H00 au bord de la vasque avec tout notre barda : bi 18L, 2 relais de 10L chacun, 2 relais de 3L, un de 2L, les propulseurs, sans parler des babioles accrochées directement sur les bi (bouffe, boisson .)
Après une préparation minutieuse, ce n'est que vers 11H30, qu'entourée d'une foule attentive de gens curieux et étonnés que nous nous immergeons tous deux dans la vasque claire.
Nous passons le passage " étroit " dans les
graviers au fond de la vasque d'entrée et mettons les propulseurs en
action pour parcourir les premiers 450 M.
Au bout de 30 M, le locoplongeur de Fredo tombe en panne. Après une
analyse rapide, il l'abandonne et continue à la palme. Pour ma part,
je garde l'Apollo et l'attends régulièrement aux points clés.
A 250m, nous quittons la large galerie du collecteur pour nous engager dans
celle, plus modeste, du réseau nord. Aujourd'hui, la visi est particulièrement
bonne et nous en profitons malgré le stress de la pointe.
Après avoir lâché l'Apollo, nous continuons tous deux
à la palme sur un parcours désormais presque familier. Nous
progressons à faible profondeur dans des galeries avec des affleurements
de " chailles " peu solides, cédant parfois sous nos tractions.
Vers 700 m, nous nous laissons glisser lentement dans le puits vertical qui
nous emmène à -43m.
A partir de ce point, la galerie remonte en pente très douce sur 250m
puis la pente se redresse et nous amène vers - 6m, profondeur à
laquelle nous finissons le parcours du S1.
Aujourd'hui, le niveau d'eau assez élevé (ce niveau étant
directement lié à l'ouverture des vannes alimentant les canaux
extérieurs) nous permet, moyennant quelques efforts de franchir le
S2 avec nos bi 18l après avoir bien sûr récupéré
nos relais de 4L laissé lors de la plongée de préparation.
Derrière le S2, nous nous harnachons dans une configuration
plus légère : bi 4l et relais de 3L chacun.
C'est ainsi qu'après une petite heure de préparation, nous reprenons
notre avancée vers le S3 distant seulement de quelques 50m.
Derrière celui-ci, nous progressons tout d'abord dans une galerie fossile
de dimensions agréables, puis rejoignons l'actif qui nous emmène
vers le S4. Nous ressentons toutefois une gêne respiratoire importante
due au CO2 et nous arrêtons plusieurs fois pour respirer sur notre 3l
de nitrox 70%.
Le S4 est une formalité. Par contre, juste derrière, un passage
étroit nous contraint à nous faire passer notre équipement
avant de plonger le S5 dans la foulée.
30 m derrière le S5, nous voilà arrivés au but de notre
quête : le S6.
Pour se remettre les lieux en mémoire, Fredo va faire les 15 premiers
mettre et revient.
Même avec un bi 4L sur le dos, le passage qu'il a entrevu entre les
blocs ne passera pas, il décide donc, comme prévu, de plonger
avec les 4l à la ceinture, maintenus sur les cuisses par des élastiques.
Pour ma part, je les ai montées sur mon baudrier à l'anglaise
avec possibilité de les décapeler rapidement.
Peu après, nous repartons donc dans le siphon. Je passe en tête
cette fois. Arrivé au terminus, j'attache mon fil et part sur 2 m pour
atteindre le passage entre les blocs.
La configuration des lieux n'est pas attirante. Je suis obligé de décapeler
un bloc pour le passer devant.
Peine perdue, une fois passée la lucarne, je ne peux que constater
que la suite ne présente absolument aucun passage et suis contraint
à faire une marche arrière bien peu commode en décapelé
partiel pour m'extirper de cette souricière.
Fredo est là, je lui fais signe que c'est fini et nous ressortons du
S6. C'est une grosse déception pour nous qui avions tant espéré
trouver la suite de ce réseau prometteur. Aussi passons-nous un bon
¼ d'heure à explorer la trémie suspendue au-dessus du
S6 en quête du moindre passage. Mais là encore, nos tentatives
seront vaines et nous ferons demi-tour la mort dans l'âme.
Nous repassons donc les courts siphons et les galeries fortement " gazées
" nous ramenant au bord du S2, où nous prendrons le temps de vider
nos relais de nitrox avant de repartir, bien chargés, vers la sortie.
En effet, notre pointe ayant été assez court, nous décidons
de ressortir tous nos relais.
C'est donc avec les deux 3l et la 2l pour Fredo et les quatre 4l pour moi
que nous repartons dans le S1.
N'étant pas pressés par le temps, nous progressons lentement
mais sûrement, passons le passage bas, remontons le puits, récupérons
nos deux relais de 10l, l'Apollo et ressortons vers 20H après 8H30
d'exploration.
Serge Gilly nous attend avec son frère Claude et quelques amis spéos.
Nous en profitons largement pour leur donner nos nombreuses charges et ressortir
de l'eau.
Après leur avoir conté nos joies, nos peines et quelques autres
anecdotes, nous rechargeons notre matériel, buvons le verre de l'amitié
et repartons vers 22H00.
En conclusion, malgré notre déception personnelle,
nous pensons avoir mis un terme aux explorations du Réseau Nord. En
effet, la trémie terminale, sauf grosse désobstruction au-dessus
du S6, ne laisse que peu d'espoir de continuations. En outre, ce réseau
ne comporte pas d'affluent notoire ni exondé, ni dans les siphons.
Le plus " simple " serait de rechercher un accès aérien
derrière le S6 pour relancer les explorations.
Cependant, le la fontaine reste très prometteuse sur le réseau
Ouest où les explorations en plongées donnent des découvertes
très fructueuses.
Remerciements :
L'association Fontaine de Nîmes et ses membres pour leur
soutien et leurs portages. Serge Gilly pour ses démarches auprès
de la municipalité, sa disponibilité totale, son aide pour les
portages et sa bonne humeur.
Christophe LAJOUX et Anne-Sophie KESSELER pour les portages et les plongées
de reconnaissance.