La mystérieuse grotte du Cholet
par Xavier Meniscus |
Les différentes explorations, depuis plus d'un siècle, ont montré
le fort potentiel de ce réseau. L'accès difficile et un cheminement
souterrain très technique, en plongée, comme en galerie exondée
(cheminée, escalade, puits, opposition, portage) ont limité
les explorations, et seule une équipe très aguerrie a pu s'y
aventurer. Plusieurs tentatives infructueuses, ces dix dernières années,
ainsi que l'historique, le compte rendu et la topo détaillée
de Maurice CHIRON, nous ont décidé, cet été, à
tenter cette expédition. Et pour cela plusieurs sorties devront être
réalisées.
Nous sommes gelés, mais les escalades qui se succèdent, et la beauté des lieux, nous réchauffent très vite. Nous explorons les moindres départs, passons plusieurs voûtes mouillantes en apnée, nageons dans des lacs souterrains avant de retrouver le fil qui plonge dans les eaux cristalline du S3, mais un incident sur un des détendeurs de Xavier, nous pousse à rebrousser chemin. Nous redescendons jusqu'au S1 prudemment, car tous les amarrages, cordes, et mousquetons sont bien usés, et nous savons qu'il faudra tout reéquiper pour nos prochaines sorties, et surtout nous habiller plus chaudement.
Malgré les différent récits que nous avions
pu lire, c'est toujours un émerveillement de découvrir un réseau
souterrain aussi grand. Sur plus de 1,5 km, la rivière souterraine
du Cholet a sculpté la roche de façon très diverse, et
les reliefs et concrétions se succèdent très rapidement.
Nous découvrons successivement des roches très érodées
par le passage de l'eau, des lames d'érosions très coupantes
(nos vêtements néoprènes s'en souviennent encore), des
coups de gouges, des marmites de géant, de la mousse de crue, des dents
de cochon, des planchers stalagmitiques, des draperies et fistuleuses ; enfin
tout ce que le monde souterrain et l'eau peuvent créer. Nous avançons
en suivant la rivière, parfois, nous la voyons disparaître sous
nos pieds nous traversons des salles gigantesques ( salle Julie : + de 50
000 m3), et des galeries plus de 10 m de diamètre, mais parfois nous
rampons lors des passage étroits , nous nageons souvent, nous passons
des voûtes mouillants en apnée lors cela est nécessaire,
et après plusieurs heures, nous retrouvons enfin le fil de Fredo POGGIA
qui plonge dans les eaux limpides du S4, et frustrés, nous faisons
demi-tour, et pensons déjà à l'organisation d'une plongée
pour passer le terminus
Le 12 août 2001 : Gaby, Stéphane et Xavier portent, jusqu'à la salle Julie, les 4 bouteilles de 9 litres pour notre future plongée de la semaine prochaine et montrent à Gaby le départ du S4. Nous aurions pu plonger ce jour-là, mais nous avons préféré ne pas prendre de risques, à cause de la fatigue du portage des 4 bouteilles sur une telle distance, nous faisons donc demi tour une nouvelle fois.
å Au total plus de 47 heures de travail ont été nécessaires, dont 28 passées sous terre pour arriver à ce jour.
MENISCUS Xavier
Le jour de la pointe
Nous sommes le samedi 18 août 2001, il est 9 h 25 mn du matin. Gaby
vient de finir sa garde de 24 heures aux pompiers de Valence, et il entame
son petit déjeuner lorsqu'il entend le bruit de moteur du 4x4 à
Stéphane.
Après avoir chargé son matériel dans son coffre ils partent
chercher Xavier, qui les attend toujours au même endroit et vers la
même heure. Depuis quelques semaines nous faisons la même route
pour arriver à notre objectif : passer le terminus POGGIA dans le S4
et voir la suite.
Après un parcours en tout terrain, nous commençons la marche
d'approche qui s'annonce toujours aussi difficile par la charge que nous supportons
sur le dos. Pour accéder à cette mystérieuse grotte,
il nous faut suivre le cours de la rivière, pendant presque une heure
avec tout notre matériel, où l'escalade est de rigueur et où
les rochers y sont très glissants. Lorsque nous arrivons au pied du
" Cholet " nous faisons tous les 3 notre habituelle pose casse-croûte
car nous savons qu'aujourd'hui plus que les autres jours qu'il faudra puiser
dans nos réserves.
Puis une marche dans les rochers et dans l'eau nous mène jusqu'au S2
où nous nageons tout en admirant le plafond éclairé par
nos jeux de lumière. Nous continuons notre progression lente mais sûre
pour arriver jusqu'au S3. Ce magnifique siphon, large de 3 à 4 mètres
et d'une profondeur de 11 mètres nous fait palmer sur plus de 150 mètres
pour stopper à notre 1er point de rendez-vous. Au menu : bananes séchées,
lait concentré sucré, crème de marron et nous sommes
repartis pour plus de 1 km pour rejoindre la salle JULIE où nous attendent
les 4x9 litres que nous avions posé précédemment.
Notre déplacement est par moment ralenti par la forme des rochers érodés
par l'eau et aussi coupants que des lames de couteaux. Dans l'effort nous
ne réalisons plus que très peu d'hommes ont eu la chance de
découvrir ses couloirs remplis de stalagmites et de stalactites d'une
rare beauté. De plafonds bas décorés par des coulées
stalagmitiques, aux marmites remplies de petits cailloux aussi lisses et ronds
que des billes, nous continuons notre difficile parcours. Enfin, il est 17
heures, et nous arrivons à la salle JULIE où nous récupérons
les bouteilles pour rejoindre le départ du S4 : notre 2ème point
de rendez-vous. Nous profitons de ce moment calme pour goûter le thé
chaud que nous à préparé Stéphane avec "
Amour ".
Il est 19 heures et nous savons tous les trois qu'à partir de ce moment
nous sommes proches du but tant convoité. Après un petit repos,
Xavier aide Stéphane à s'équiper de manière à
lui rendre la tâche plus facile et de lui laisser le temps de se concentrer.
Stéphane est à la fois plein d'enthousiasme et de volonté
mais il reste méthodique de manière à ne rien oublier
qui compromettrait cette plongée. Nous l'accompagnons jusqu'au départ
du S4 et d'un geste rapide, il commence à pénétrer dans
ce boyau si transparent et attirant avec une cadence de palmage sûre
et énergique.
Pour Xavier et moi, l'attente sous les couvertures de survies a commencé
dans une ambiance humide et silencieuse.
Puis vers 22 heures nous commençons à rebrousser chemin, et nous déposons 2x9 litres dans la salle JULIE et gardons les 2 autres de façon à ce que Gaby plonge un siphon situé après le S3 (40m de fil + 60 m de galerie voir +++) susceptible de rejoindre la galerie principale.
Ce n'est qu'à 4 h 30 mn du matin que nous sortons à l'air libre le corps épuisé mais l'esprit remplie d'images et de bonheur, pour finalement arriver sur Valence vers 6 heures du matin pour nous coucher, vidés. Nous retournerons chercher les 2 dernières bouteilles et déséquiper, un mois plus tard, avec David.
- TPST : 16 heures - Distance total parcourue sous terre : +
de 5 Km
- 350 m de fil déroulé
Gabriel HUDE
La plongée du S4
Après un repos de quelque minutes et un thé chaud soigneusement
préparé par Gaby et Xavier, je m'équipe lentement, concentré
sur ma plongée, et à ce que je vais trouver après les
250 mètres de Frédo. Je suis prêt, Xavier et Gaby me donnent
un dernier coup de main, pour m'avancer avec mes 4 X 9 litres, et je pars
dans le S4, avec 2 bouteilles en dorsal et 2 en ventral. Gaby prend une dernière
photo. Motivé et la rage au ventre, je m'engage dans le siphon tant
espéré, et je me rends compte que ceci et l'aboutissement de
plusieurs jours de travail.
Arrivé à un point bas, -17 m, à 300 m du départ,
me voilà face à une grenouille terrestre. Je doute, et en la
regardant bien, je me demande par où a-t-elle bien pu arriver jusqu'ici.
Cela annoncerait il la fin du Cholet, vais je déboucher à la
surface ? Je reprends ma plongée, à 400 m du départ du
S4, je me trouve devant une faille qui remonte. A 450 m, au dessus de moi,
le miroir. Une poussée d'adrénaline me pousse à accrocher
le fil autour d'un bloc et à sortir.
Devant moi, un couloir aquatique d'une trentaine de mètres. Je nage
jusqu'à avoir pied et sort péniblement de l'eau pour progresser
sur un plancher percé de marmites d'érosions. Je pose mon scaphandre
juste après un petit lac peu profond. Derrière, je découvre
une galerie (" Galerie de la Grenouille " : 6 m x 5 m) d'une longueur
de 100 mètres. Une trémie obstrue mon parcours ; avec déception,
je ne trouve aucun passage à travers les blocs. En redescendant, je
vois sur la gauche un petit boyau (1,50 m x1 m). En y entrant, de la mousse
de crue attire mon regard. Je décide de continuer par là. Je
progresse sur une dizaine de mètres, ça continue ! Mais il est
temps de faire demi tour, car cela fait bientôt 1 h 30 que je suis parti,
Xavier et Gaby doivent m'attendre impatiemment, dans le froid et l'humidité
de la galerie post S4. Ce passage me laisse perplexe. Cela est il la fin du
S4 et la fin du Cholet ? J'en doute. Le retour se passe sans trop de problèmes,
content de cette première et aussi de retrouver Xavier et Gaby autour
d'un thé chaud, qui m'assaillent de questions. Trop Heureux, Xavier
retourne plonger le S4 pour rabouter le fil, cassé lors de mon retour,
que je n'ai pu raccrocher, avec deux de mes bouteilles à moitiés
pleines.
Je tiens à remercier Gaby, Xavier et David pour leur portage et leur soutien moral, sans eux, le première n'aurait pas pu être envisagée ainsi que Jo et le club spéléo des pompiers de Grenoble pour leur aide matériel.
Stéphane Roussel