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paru dans le numéro 55 de la revue "Spéléo".
« C'est là que je veux rester, Bercé par la mélopée ( http://www.dimonelesite.com cliquer sur « écouter » puis « Chez Neptune »), les minutes s'égrennent, au rythme des arpèges veloutés. -6m. Moment de l'immersion où le temps s'allonge, s'étire en une station infinie, imposée par la décompression. Les moments forts, les souvenirs encore vifs, de ce vécu proche et fugace, qui s'éloigne trop vite, le partagent à l'histoire de la caverne, ses inévitables péripéties, aux évolutions consenties de l'approche.
Mai 2006, siphon nord du Peyrou de Chadouillet - Ardèche. Nous venons de progresser de 200m supplémentaires, jusqu'à 880m de la mise à l'eau, dans une galerie modeste au profil capricieux. Une plongée, en recycleur et au propulseur, débutée en trinome mais terminée en binome (pour cause de bouteille de secours qui se vide pendant la folle chevauchée. Il faut dire qu'on débute au propulseur). Une plongée de 262 minutes. L'amplitude de ses frasques (évolution en dents de scie) confére à cette plongée un caractère « expérimental » en matière de décompression. Suffisament pour donner à réfléchir sur l'oportunité de poursuivre une telle exploration. Mais rien ne fut jamais simple dans ce siphon. Flash-back 1994 : le peyraou n'intéresse plus personne, ou presque. La branche amont, pas encore baptisée « Bertrand Leger », est colmatée par du sable dans le S.6, après une étroiture à l'entrée du siphon 1. Notre fine équipe d'alors ignorait tout, ou presque, du karst de Saint-André de Cruzières, synclinal, à la fois gardois et ardèchois, draîné par la Claysse. J'ai oublié, depuis, à quelle occasion je croisais Michel Chabaud. Diable d'homme ! Le doigt était pris dans un fol engrenage, qui allait nous conduire dans une aventure de longue durée, à facettes multiples. Humanum est Le Peyraou est d'abord une aventure humaine. Débutée à deux plongeurs, elle draîne aujourd'hui plus de vingt personnes à chaque opportunité exploratoire. Ce fut une expérience riche, avec ses aventures partagées, ses projets enfiévrés, ses espoirs et ses déceptions. Le crépuscule du 20 ème siècle se décline à la sauce FFESSM. Statut d'expédition nationale en poche, les explorations reprennent, avec entre autres Patrick Mugnier comme prétendant au déroulage. Et Roger Cossemyns et Marc Vandermeulen en cocus sympathiques. Le nouveau millénaire verra Jean-Marc Belin, puis Mehdi Dighouth dénicher leur part de face cachée. Le partage de l'exploration, la « première », cette particularité trépidante et passionnée de nos activités, doit demeurer un plaisir réciproque. Bien qu'épicuriens du passage de témoin, nous avons parfois déclaré forfait. La pression delétère, entretenue une obédience à l'approche oedipienne, plus proche de la confrontation malsaine que de la collaboration entre équipes, aura eu l'avantage de faire tomber les masques d'un cupide jeu de dupes. Aujourd'hui, relifté et sécurisé ( plus de 20 sorties au nettoyage/reéquipement/photo/topo) par nos soins , ce siphon est devenu un « spot ». Il paraîtrait même qu'on se bouscule à l'entrée, dans toutes les langues, et même entre DIR et strokes, certains jours d'affluence exceptionnelle. Le laboratoire involontaire. Le premier de nos périples, dans le siphon nord (1995) fut l'ultime avec les techniques employées. Temps des combinaisons humides, des bouteilles de 12 litres, des plongées à l'air dans la zone des -50, avec juste un biberon d'O2 pour se donner bonne conscience aux paliers. Vint le temps des plongées profondes (-78), entre 1996 et 1997, avec l'arrivée des surox (francisation d'époque), de nos premiers vêtements étanches et de gros scaphandres, acquis d'occasion à des plongeurs étrangers, puisque « hors normes » in France. Les « giclettes », associées aux ordinateurs de poignet, étaient censées éclaircir les méninges dans « l'espace lointain ». On y croyait, mais la méthode Couet n'est pas toujours la panacée Puis vinrent les tables trimix Doris (circulant allègrement, mais sous le manteau) "adaptées". La « sécurisation » de ces abaques consistait à optimiser chaque mélange de décompression (Trimix et Nitrox) par un changement de gaz pratiquement à chaque palier. Imaginez les temps de préparation, la quantité de blocs et de détendeurs impliqués. L'O2 était consommé sans modération à partir de -12 et la décompression calculée avec temps total de progression à la profondeur maximale (ramenant les paramètres à celui d'un profil carré). Les tables Trimix sportives (Trimix 17/43/40), concoctées en 1998 par Jean-Pierre Imbert, se conjuguent au calcul de temps de paliers avec conversion de profondeur (conversion du temps passé à 50, en temps passé à 80, pour rentrer dans la table avec des paramètres "carrés") avec air, nitrox et O2 en décompression. Sensibilisés aux problèmes de contre-diffusion, le trimix fond est respiré un peu plus haut en décompression, puis on saute sur le Nitrox un peu plus bas (en conservant une PPo2 max de 1,8 en décompression). Avec des rinçages au mélange-fond toutes les 25 minutes uniquement durant les paliers à l'O2. Nous n'avons pas la prétention d'avoir inventé quoi que ce soit. A partir de 1999, les logiciels de décompression révolutionnent la plongée trimix. Les consciences s'éveillent aux nouvelles théories. Le plongeur trimix devient autonome et plus compétent. Il faut choisir ses mélanges de décompression, jongler avec les « gradient factors », adapter ses procédures de remontée. Nous revoyons à la baisse les PPO2 (1,4 bar maximum en progression - mais souvent moins lors d'exposition prolongées à la profondeur max. et 1,6 bar en décompression) et appliquons le principe de remontée lente (un stop d'1 min tous les trois mètres à partir de 80% de la profondeur max.), ainsi que l'optimisation à chaque changement de mélange (5min de palier sur le nouveau mélange, à la profondeur à laquelle sa PPO2 est la plus élevée). Lors la dernière pointe de 2005, les gradient factors furent ajustés pour diminuer un tantinet le temps d'O2 à -6, et combinés à une insertion d'He dans les mélanges de décompression entre autres. L'apparition d'ordinateurs multi-gaz et à PPO2 constante rend la tâche encore plus aisée. A dégouter les prosélytes du circuit ouvert, les nostalgiques de la performance physique, les acharnés des tables professionnelles des années 70. Aventure fédéraste « Notre » Peyraou a débuté avec la modeste tribu Celadon. Aventure organisationnelle Plus l'inconnu s'éloigne de l'entrée, moins l'organisation des explorations est aisée. Ce Peyraou, ingrat et irrévérencieux, n'aura épargné aucun motif pour contrarier nos plongées : No dive in the rain Bien que situé en basse Ardèche, le karst de Saint-André de Cruzières n'est épargné, ni par les précipitations qui s'abattent sur la chaîne des Cévennes voisine, ni par les violents orages poussés par les vents maritimes. Certains hivers, la neige, en fondant, entretient un niveau rédhibitoire. Il nous est même arrivé de devoir, en catastrophe, aller récupérer tout le matériel installé dans la cavité, avant la pointe, pour cause d'alerte météo. Chaque exploration compte double La première partie du siphon nord est stagnante. Un talus argileux à la mise à l'eau colore à coup sùr et durablement cette première tranche du siphon. De ce fait, il est préférable d'espacer les plongées de préparation (dépose de la ligne de décompression, des bouteilles-relais de progression et des propulseurs) réalisées souvent le mercredi, des plongées d'exploration, apanage du week-end. La technique c'est fantastique Plus y'en a, moins ça va. Les pannes et entretiens divers occupent une place de choix, dans la liste des petites contrariétés conclues par une sortie reportée. Sondes à oxygènes des recycleurs qui défaillent, propulseurs (prêtés par les copains) qui déraillent, propulseurs fédéraux portés pâles ou indisponibles dès lors que nous évoquons leur existence. Las, nous consentirons, non sans négociations bancaires préalables, à l'achat de ces coûteux destriers. C'était sans compter avec de sérieux retards de livraison, qui nous contraindront à différer une fois de plus. Avec un rebondissement, car ils seront livrés en kit et incomplets. Contingences de l'existence Le bateau des couples bien avancé sur l'Océan de la vie, l'aventure du Peyraou s'est doublée d'une floraison de rejetons. Avec les nuits blanches associées, consacrées aux biberons, aux maladies infantiles, aux poussées de dents, le tout bien souvent au plus mauvais moment (du genre la semaine avant la pointe). A l'inverse, des copains sont partis, parfois en groupe, comme à l'automne et en début d'hiver 2001, ne laissant à ceux qui restent qu'amertume et souvenirs. Enfin, cerise sur le gâteau, un sauvetage souterrain mobilisera, pendant une semaine, une bonne partie de l'équipe juste avant une exploration au final déprogrammée Aventure fantasmagorique Il est des siphons dont on pourrait presque augurer les prolongements. Le Peyraou n'est assurément pas de ceux-là. En 1995, la surprise vint de la profondeur « record » de 78, alors que personne n'aurait parié qu'un siphon descendrait en-deçà de 50, dans ce secteur. On pensa alors que le siphon, tel qu'il était parti, persisterait dans sa tendance abyssale. Jusqu'à ce qu'une funeste pointe de 2003 bute sur un retrécissement impénétrable. Pas question de laisser ce trou en l'état (arrêt sur étroiture), car nul n'y croyait. Effectivement, deux pointes plus tard, l'espoir de « sortir » le siphon était renforcé (-4 à 680m de l'entrée). Mais l'homme fantasme et la nature mène la vie dure. L'ultime découverte enterre ce fol espoir, avec un nouveau tour de yo-yo à dominante dégringolante. L'aventure continuera-t-elle ? En une douzaine d'années, avec toutefois quelques pointillés, nous avons progressé, à notre allure de sénateur et avec nos disponibilités de pères de famille, jusqu'à 880m de l'entrée dans le siphon nord et plus de 1000m dans la branche Bertrand Leger. Plus de 2200m de galeries ont été topographiées. Le cumul de paramètres aggravants (distance, profondeur, profil en yo-yo) impose une période de réflexion avant de rechausser les botillons. Dans cette passionnante quête des confins sub-terresters, nous appréhendons l'exploration comme d'éternels débutants, tant dans la connaissance de la caverne, que le suivi des évolutions techniques C'est dans cet esprit que, du fait de nos interrogations et de notre indisponibilité estivale (car mobilisés sur d'autres objectifs - au final fort fructueux), nous passons le relais à John Volanthen. John avait été sciemment orienté vers le Peyraou, en 2005, par un plongeur français sous prétexte que « la cavité était prometteuse et que personne ne travaillait dessus ». Informé, seulement quinze jours après avoir découvert le « passage-clé », avant le cul-de-sac terminal de 2003, nous avions pris contact. John avait accepté de nous laisser poursuivre à notre rythme, tout en gardant régulièrement le contact. En juillet 2006, John, accompagné de Rick Stanton, a progressé de 140m supplémentaires, dans une galerie accidentée, jusqu'à une trémie, après une étroiture. Participants 2006 Allemagne : Michael et Karen Klemm, Bjorn Steuriech. Belgique : Raphaël Bechet et Madame, Roger Cossemyns (Vicomte de Braine), Françoise Minne, Jacques Petit, Vincent Poisson et Madame, Marc Vandermeulen, Geoffroy de Visscher. Douce France : Anne Johannet, Marc Plouhinec, Pascal Moinard, Ronan Turpin, Gilles Vareilhes, Elodie Dardenne, Christian Bagarre, Michel Valentin et Madame, Marjolaine Vaucher, Régis Brahic, Michel Wienin, Michel Chabaud, Christian, Christophe et le petit dernier Bouquet, Jean-Louis Galera, Mehdi Dighouth, Eric Julien, Cyril Marchal, Jean-Marc Belin, Christian Moreau, Frank Vasseur. Et en invité surprise : Cyrille Brandt et Madame, pour confirmer la tendance internationale et féminine de cette explo. Remerciements Merci à nos partenaires pour la confiance et le soutien qu'ils nous accordent.
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Christian dans l'entrée, par Jean-Louis Galera
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