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En 1951 nous ne connaissons personne
qui pratique la plongée souterraine, d'ailleurs y en a-t-il ? |
Octobre 51. Siphon de la Balme (Isére)
Conclusions.
1 . Il faut absolument très bien se protéger du froid.
2 . Il faut évidemment un détendeur qui marche bien.
Novembre 51. Siphon de la Balme (Isère)
Ce siphon n'est peut-être pas long ! Essayons de le franchir sans scaphandre ! Nous avons amélioré les compétences de notre couche de graisse en lui mélangeant du " Dolpic ". Nous sommes deux. Nous nous ventilons bien, puis un "canard" et c'est parti. L'eau, toujours aussi glacée, est très claire; nous palmons dans une grande galerie et parcourons une douzaine de mètres avant de faire demi-tour, à bout de souffle et gelés.
Conclusions.
Pas de doute, il faut un scaphandre pour franchir les siphons.
Janvier 52. Siphon de la Balme (Isère)
Conclusions.
1 . Bien protégé du froid ça change tout.
2 . Il faut être autonome dans la progression.
3 . Il faut pouvoir envoyer des nouvelles en surface.
Novembre 52. Siphon de la Balme (Isère)
Mais l'eau s'est troublée derrière nous. Nous sommes dans un liquide
jaunâtre. Nous nous cognons aux parois, l'angoisse m'étreint de
me perdre dans un boyau et nous retrouvons le projecteur. Ouf ! Il n'y a plus
qu'à suivre le câble jusqu'à la barque. Nous avons parcouru
70 mètres et toujours pas franchi le siphon.
Conclusions.
1 . Tirer un câble ne convient pas, il faut le dérouler soi-même
sous l'eau.
2. Il ne faut pas plonger sans " fil d'Ariane " dans de l'eau pouvant
se troubler.
Décembre 52. Siphon de la Balme (Isère)
Conclusions
Il ne suffit pas d'être bon spéléo pour se lancer dans un
siphon. Tout le monde n'est pas fait pour ça.^
1er janvier 53. Siphon de la Diau (Haute-Savoie)
Montée dans la neige lourdement chargés (bouteilles, ceintures
de plomb, etc.) et, au bout de 2,5 kilomètres de rivière souterraine
difficile et 10 heures, nous ne sommes plus que trois. Je suis fatigué,
je m'équipe mais la vareuse de la Tarzan se déchire complètement
dans le dos. L'eau fait 2° mais je veux quand même plonger, nous sommes
venus pour ça et c'est le jour de mon anniversaire, j'ai vingt ans. Je
parcours 15 mètres dans le siphon, très beau mais c'est de la
glace liquide.Je ne résiste pas plus de quelques minutes puis rentre
le souffle coupé.
Conclusions.
1 . Le, ou les, plongeurs doivent arriver au siphon sans fatigue.
2 . Le matériel doit être impeccable sinon danger.
1953-1954. Plusieurs siphons
Nous avons fabriqué un dévidoir léger (il n'est pas étanche,
c'est inutile en eau douce). Il contient 100 mètres de fil électrique,
simple, marqué tous les 10 mètres. Il possède en son centre
une lampe et un contacteur qui permettent aussi bien d'envoyer des signaux qu'en
recevoir. Quand les 100 mètres de fil sont déroulés on
peut lui accoupler un second dévidoir du même modèle ! L'alimentation
électrique reste en surface. Au cours de ces deux années, nous
avons plongé avec dans de nombreux siphons en Ardèche, à
la Pierre Saint-Martin, dans l'Ain, en Provence, dans le Vercors.
Avril 55. Résurgence du Cholet (Vercors)
Conclusions .
Deux bouteilles indépendantes sont absolument nécessaires pour
avoir la sécurité du retour mais il faut un détendeur sur
chaque bouteille. Avant de plonger on ouvre les deux robinets pour éviter
un décapelage toujours délicat en siphon.
Mai 55. Cuves de Sassenage, résurgence du gouffre Berger.
Nous sommes deux et franchissons un premier siphon de 25 mètres, derriére,
une grande salle et une galerie sèche. Retour en surface pour revenir
avec carbure et matériel topo mais au moment de me remettre à
l'eau la membrane de mon détendeur (Mistral n°283) saute. Impossible
de réparer ici. Donc je franchis les 25 mètres du siphon en apnée,
surveillé par Bernard dont le détendeur fonctionne bien. De l'autre
côté, la grande salle n'a pas de départ de galerie supérieure
et un second siphon parcouru sur 100 mètres, jusqu'au bout du fil du
dévidoir, plonge inexorablement.
Conclusions.
II faut avoir un détendeur de secours et de quoi réparer.
Juin 55. Siphon de Labouiche (Ariège)
Casteret et Delteil nous invitent à plonger dans le siphon de Labouiche.
Je pars avec Serge, le siphon descend, la voûte s'abaisse, le sable se
soulève, l'eau se trouble. Je me retourne souvent pour voir si Serge
me suit bien. Soudain, à 30 mètres du départ je ne le vois
plus. Je pose le dévidoir et rentre à toutes palmes dans l'eau
complètement opaque. L'équipe de surface vient de le sortir de
l'eau. A 20 mètres, son détendeur ne lui a plus envoyé
que de l'eau. Encore la membrane...
Je replonge, avec Bernard cette fois. Au bout de 70 mètres et 20 mètres
de profondeur, le siphon devient trop étroit et turbide. Bernard est
derrière moi, je lui fais signe de faire demi-tour, Nous rentrons. Il
se retourne et avec une de ses palmes fait sauter mon embout. Très désagréable.
Je le cherche, il est passé derrière ma tête, je suis en
expiration. Enfin je le retrouve mais il est plein d'eau. Il faut la boire avant
d'avoir un peu d'air qui finalement arrive normalement. Inutile de dire que
je ne traîne plus ici. Bernard esten surface, il m'attend tranquillement,
il ne s'est aperçu de rien.
Conclusions.
1 . Il vaut mieux plonger seul car le compagnon mobilise votre attention au
détriment de votre propre sécurité.
2 . Il peut créer un incident du genre de celui qui vient de m 'arriver.
Août 57. Gourp de Féneyols (Tarn-et-Garonne)
Conclusions.
1 . Il se confirme qu'il faut 2 bouteilles et 2 détendeurs indépendants?
2 . Le bouchon d'embout laisse pénétrer l'eau dans les tuyaux,
les vider quand on est en panne sur l'autre appareil est un exercice périlleux
en plongée souterraine.
Août 57. Fontaine de Touriez (Tarn-et-Garonne)
Aujourd'hui, c'est ma lampe torche qui s'éteint. Heureusement, la lumière
du dévidoir et le fil d'Ariane me permettent de rentrer sans autre problème.
Conclusions
. Il faut avoir plusieurs sources d'éclairage.
Octobre 57. Siphon de Taï, St-Nazaire-en-Royans (Drôme)
Quarante mètres, siphon franchi. Je mousquetonne le dévidoir à
ma ceinture et je rentre. Mais il se décroche, tombe sur le fond et envoie
des signaux incohérents qui affolent les copains en surface.
Conclusions.
Il faut améliorer le contacteur pour qu'il ne puisse envoyer des signaux
tout seul (et ne pas le lâcher en route !).
Avril 61. Siphon de Fontgrand (Ardèche)
Il faut donc retrouver la galerie principale du siphon mais, mauvaise surprise, la cheminée d'accès n'est pas balayée par le courant, la glaise s'y est déposée et l'eau est complètement opaque. Après plusieurs tentatives, nous ne retrouvons pas le passage. Nos bouteilles se vident. Nous allons rester prisonniers de cette cheminée. Il n'est pas certain que nos collègues nous rejoignent. Alors il faut trouver la sortie. A tour de rôle, celui de derrière tient une des palmes de celui qui fouille devant. Ça y est ! Nous nous échappons de la cheminée et retrouvons l'eau claire du siphon principal. Les copains ne se sont doutés de rien, trouvant simplement notre plongée un peu longue.
Conclusions
Même si l'eau est claire, ne jamais plonger sans fil d'Ariane ou fil conducteur.
L'exploration des siphons ne fait certainement que commencer mais nous croyons
que les premières règles que nous avons découvertes à
nos risques et périls, mais avec combien de joie, resteront d'actualité.
Février 1961 Trou de l'Abîme - Jura |