Plonger sous terre : le milieu souterrain
par Cyril Marchal et Frank Vasseur |
Féerie des rivières souterraines. |
Avertissement La plongée maritime, activité de « pleine nature », est soumise aux influences climatiques extérieures. La plongée souterraine l'est d'autant plus que le contexte naturel et physique dans lequel elle se pratique peut devenir violemment réactif. On considèrerait la plongée souterraine « par le petit bout de la lorgnette » si on se limitait au siphon dans lequel on s'engage. Sous terre, chaque siphon fait partie d'une cavité. Chaque cavité est partie intégrante d'un système karstique (relief calcaire), qui constitue, du fait de la perméabilité de cette roche sédimentaire, une vaste zone d'absorption des eaux de pluie, voire, plus rarement, de cours d'eau aériens. Une fois infiltrée dans la roche, l'eau souterraine se structure, se hiérarchise. Elle gonfle en collectant plusieurs ruisseaux, elle peut aussi se diviser momentanément ou définitivement. Il en va de même pour les résurgences, qui constituent le point de réapparition, à l'air libre, des eaux après un parcours parfois long et complexe dans les arcanes. Il peut être salutaire de s'enquérir de l'étendue de l'impluvium (bassin d'alimentation) d'une source. Une pluie fine, d'apparence insignifiante, le sera certainement moins si on la rapporte à la surface drainée. Ajoutons à cela la complexité (la sournoiserie) du karst, qui peut étendre cette zone de collecte sous des versants pourtant déversés vers d'autres émergences. Ainsi, un orage sur un versant d'une montagne pourra générer une mise en charge des sources situées à la base de l'autre versant. En simplifiant à l'extrême, certains « karsts », à l'image de l'éponge ménagère, ont une capacité de stockage qui peut différer, temporiser, les effets de certaines précipitations (karst « capacitifs »). A l'inverse, d'autres types de massifs sont de véritables « autoroutes de crue », qui canalisent à la manière des gouttières domestiques et réagissent brusquement (karst « transmissif »). Les rivières souterraines, les karst noyés sont particulièrement capricieux. Un ruissellement anodin peut se déchaîner en flot impétueux en seulement quelques heures, voire beaucoup moins. Quelques lectures édifiantes en la matière : mas neuf recit vasseur ou encore : ekpp.de/projects/gourneyras Leurs réactions sont difficilement prévisibles. La « mise en charge » d'un siphon, d'une cavité peut s'accompagner d'un envahissement par l'eau de conduits habituellement exondés, de l'activation de courant dans des passages habituellement calmes, d'importantes accélérations de courant et d'augmentations de débits. Les effets et morphologies des crues dépendent de trop de facteurs (durée, étendue, intensité des pluies) pour être anticipés avec justesse. Il est nécessaire, avant de s'engager sous terre, de se renseigner préalablement tant sur les conditions météorologiques de la période que sur la réactivité de la cavité, si le temps est ou a été incertain afin d'éviter de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment. Prolégomènes Avant de s'engager sous terre et sous l'eau, mieux vaut être « au clair » avec un minimum de notions élémentaires. La plongée souterraine se pratique dans un environnement particulier, où il n'existe pas de plongée « facile ». Le karst (montagne calcaire) est un milieu spécifique, fondamentalement différent de la surface libre et d'autres plongées en surface non libre (glace, carrières, épaves, structures artificielles…etc.). Aussi, il a fallu adapter les techniques de plongée « libre » pour développer de logiques de sécurité adaptées, inventer du matériel approprié. Mais si les techniques et les logiques de sécurité sont fondamentales, la connaissance du milieu l'est tout autant. La « lecture » du milieu implique la connaissance préalable de « pièges » intuitivement indécelables, afin de les repérer et les éviter. Enfin, au-delà des contingences sécuritaires, le milieu souterrain demeure un fabuleux domaine d'étude et d'exploration, riche et diversifié. Sous cet angle aussi, la particularité de l'univers souterrain noyé requiert une réflexion préalable, l'acquisition de connaissances et enfin un sens de l'observation approfondi pour apprécier pleinement l'environnement des « siphonnés ». 2. L'obscurité Aux rares exceptions de grottes sous-marines près, on plonge en eau douce. L'eau est froide, se trouble souvent, sa qualité est quelquefois douteuse. Elle se déplace parfois avec force, sa puissance varie en fonction des changements de section et d'orientation de la galerie. 3.1 L'eau douce 3.1.1. Flottabilité 3.2 La température 3.3 Salubrité 3.4 La turbidité 3.6 Différents accès à l'écoulement souterrain 3.6.1. Emergence 4. La roche 4.1 Teinte 4.2 Galeries instables 5. La morphologie du siphon Dame Nature est prolixe, pourvu qu'on la conserve ainsi. Les conduits souterrains n'échappent pas à cette variété, et nombre de sections « typiques » peuvent être retenues. 5.1 Conduit labyrinthique 5.2 Laminoir 5.3 Fracture 5.4 Trémie 5.5 Etroitures 5.6 Profils en yo-yo 5.7 les puits Absence de repères visuels concernant la profondeur 6. Les indices de direction du courant 6.1 Ripple-marks et coups de gouge . 6.2 Granulométrie 6.2.1 en aval des blocs 7.1 les talus de galets 7.2 l'argile 9. Le fil d'Ariane 10. Préserver l'accès au milieu 11 Protéger les cavités 12 Un milieu d'études riche et varié 12.1 Cartographie 12.2 Les sciences du passé 12.2.1 Les fossiles. 12.3 Les sciences du vivant 12.3.1 Le Niphargus, Les Asellides Conclusion La spécificité de la plongée souterraine, les particularités du milieu souterrain noyé induisent, pour le plongeur habitué à évoluer sous surface libre, des modifications radicales de l'équipement, une rigueur particulière dans la programmation des plongées et un apprentissage progressif des techniques utilisées. Mais la partie technique, pour importante qu'elle soit, ne doit pas occulter ou minimiser la nécessaire connaissance du milieu. Le principal risque de cette activité demeure la facilité avec laquelle il est possible de s'engager dans un siphon et les difficultés auxquelles on peut être confronté pour en sortir. Les problèmes induits par le milieu sont multiples. Il est difficile, pour le néophyte, de les envisager tous. En conséquence chaque plongée impose :
Plonger c'est s'adapter au milieu, lequel n'est par définition pas uniforme , et évolue durant nos incursions. A ce titre, la plongée souterraine offre un large panel de progressions :
Chaque plongée est considérée comme un cas particulier auquel tout plongeur, du cacique au néophyte, doit systématiquement s'adapter. |