SPELEO SECOURS
Puéchabon - Hérault par Frank Vasseur |
(Communiqué officiel du Spéléo Secours Français) Lundi 4 juin 2001-Situation à 09 H 30 Le Spéléo Secours Français est engagé dans une opération de secours à la grotte des Fontanilles (Puéchabon - Hérault). Un plongeur spéléo est actuellement porté disparu. L'alerte à été donnée au SSF à 2 H 45, lundi 4 juin 2001. Lundi 4 juin 2001-Situation à 12 H 00 Le Spéléo Secours Français en concertation avec le Spéléo Secours de l'Hérault - coordinateur des opérations souterraines, la commission plongée de la FFS, la FFESSM et les autorités locales après analyse de la situation, prépare une reconnaissance jusqu'à -40 mètres dans le 6ème siphon, lieu de la disparition du plongeur. La reconnaissance débutera en fin de soirée. Lundi 4 juin 2001-Situation à 18 H 00 La grotte des Fontanilles a un développement de 1852 mètres et se compose de 6 parties noyées et de galeries exondées nécessitant quelques escalades et un portage difficile du matériel de plongée. Le plongeur disparu avait entrepris une plongée aux mélanges dans le dernier siphon connu. Il est équipé de 4 bouteilles. 2 lui permettant d'atteindre une profondeur de -140 mètres et 2 autres pour assurer les paliers nécessaires à la sortie du siphon. Avec l'équipement dont il dispose, le plongeur peut avoir franchi le siphon ou bien se trouver dans une partie inconnue de ce siphon. Il est membre du Spéléo Secours Français et a participé par le passé à des secours d'envergure. Mardi 5 juin 2001-Situation à 8 H 00 Retour de l'équipe de la plongée de reconnaissance à la cote -40 dans le siphon 6. A la côte -30 mètres environ : le spéléo plongeur sauveteur voit le fil d'Ariane sectionné, de ce fait il attache son fil d'Ariane personnel et atteint la côte -40 mètres où il découvre deux choses : - Une bouteille de décompression en appui sur la pente avec les détendeurs pendants. L'hypothèse émise par l'équipe de Conseillers Techniques du SSF est la suivante : Dans cette zone du siphon, la hauteur sous plafond est importante. Le plongeur disparu, suite à un problème technique, pourrait être remonté au plafond pour chercher une cloche d'air qu'il aurait trouvée. Pour signaler sa présence, il serait redescendu au niveau du fil d'Ariane, aurait attaché son masque proprement après le fil d'Ariane, serait remonté dans la cloche d'air et comme autre indice de sa présence aurait jeté sa bouteille de décompression qui dans sa chute aurait sectionnée le fil d'Ariane et glissé de quelques mètres. Actuellement le SSF met en place une stratégie de plongée pour orienter les recherches dans ce sens. Mardi 5 juin 2001-Situation à 21 H 30 Précision : l'hypothèse émise par l'équipe de Conseillers Techniques du SSf est la suivante : Dans cette zone du siphon, la hauteur sous plafond est importante. Le plongeur disparu, suite à un problème technique, pourrait être remonté au plafond pour chercher une cloche d'air qu'il aurait trouvée. Pour signaler sa présence, il aurait attaché son masque proprement après son fil d'Ariane, l'aurait laissé redescendre et comme autre indice de sa présence il aurait jeté sa bouteille de décompression qui dans sa chute aurait sectionné le fil d'Ariane et glissé de quelques mètres. Actuellement le SSF met en place une stratégie de plongée pour orienter les recherches dans ce sens. PLONGEES ENVISAGEES : Préparatifs importants, prenant du temps, d'où l'impossibilité de reprendre les plongées avant mercredi matin 7 h.
Mercredi 6 juin 2001-Situation à 09 H 00 L'équipe de plongeurs spéléologues et leurs accompagnateurs sont entrés dans la grotte à 7 H 00. Ils s'immergeront dans le 1er siphon vers 10 H 30 et ils auront environ 2 H de progression pour arriver au bord du siphon 6. L'équipe est prête à répondre à tous les cas de figures qui se présenteront. Sont prêts à intervenir :
Mercredi 6 juin 2001-Situation à 15 H 50 Le plongeur vient d'être retrouvé vivant dans une poche d'air. Patrick Mugnier a été retrouvé vivant. Un médecin spéléo-plongeur va se rendre vers lui pour médicaliser et préparer la sortie. Mercredi 6 juin 2001-Situation à 17 H 50 Le spéléologue disparu a été retrouvé vivant à fleur d'eau sur un rocher. Il est conscient mais a du mal à respirer. Mercredi 6 juin 2001-Situation à 20 H 00 Au vu de la situation critique, l'équipe de plongeurs-spéléologues, en relation avec les Conseillers Techniques en surface, ont décidé, toutes considérations de sécurité et de santé requises, de faire franchir à Patrick Mugnier le siphon 6. Il est actuellement installé dans un point chaud entre le siphon 5 et le siphon 6, pour attendre l'arrivée du médecin. Dès que Bernard Gauche, Médecin spéléo-plongeur du SSF qui actuellement progresse vers lui, aura donné un avis favorable tout sera mis en oeuvre pour assurer son évacuation. Jeudi 7 juin 2001-Situation à 07 H 00 Bernard Gauche spéléo-plongeur du SSF, médecin (spécialisé hyperbare) est arrivé à 00 H 30 au point chaud où se situe Patrick Mugnier. L'état de ce dernier s'améliore d'heure en heure. Il marche, se réhydrate et récupère sa température vers la normale. Lorsque Frank Vasseur (spéléo-plongeur du SSF) l'a découvert, Patrick Mugnier était allongé et avait des difficultés respiratoires, la poche d'air était saturée en CO2 dégagé par le plongeur. Après discussion, il s'est avéré impératif pour ces deux plongeurs de ressortir entre le siphon 6 et le siphon 5. Le point le plus bas à franchir étant de - 20 mètres. Une fois sortie du siphon 6, ils se retrouvent au point chaud prévu à cet effet. Bernard Gauche l'ausculte actuellement et fera dans les heures à venir un bilan médical. Suite à ce bilan, le médecin pourra définir les conditions et l'heure de départ de l'évacuation. Suffisamment de plongeurs-spéléologues (30) sont sur place ainsi que de spéléologues (20), afin d'organiser cette évacuation avec la sécurité requise pour tous. Jeudi 7 juin 2001-Situation à 17 H 50 17h50 Bilan de santé par le médecin dans le VSAB : Excellent état physique et physiologique, Patrick Mugnier a subi dimanche un accident de décompression articulaire et il est actuellement sous oxygène pur. Il va être transféré par hélicoptère SAMU 34 vers la clinique St-Pierre à Perpignan (caisson hyperbare). Jeudi 7 juin 2001-18 H 00 Fédération Française de Spéléologie Communiqué à l'AFP Le bureau de la Fédération Française de Spéléologie (FFS) apprend avec plaisir et soulagement l'heureuse issue du sauvetage de Patrick Mugnier dans le gouffre de Fontanilles à Puéchabon (Hérault). Nous exprimons nos remerciements à tous les sauveteurs et plongeurs du Spéléo-Secours Français, commission de la FFS, ainsi qu'à tous les autres participants à cette opération de secours, bénévoles et corps constitués, qui ont contribué avec efficacité et dévouement à ce résultat. Patrick Mugnier, qui fait partie des meilleurs plongeurs souterrains du moment, compte à son actif d'importantes découvertes et explorations et contribue au développement des techniques de plongée profonde en spéléologie. Pour autant, la Fédération Française de Spéléologie ne peut cautionner le fait qu'une équipe se soit engagée dans cette exploration en ignorant la réglementation locale. Lorsque les circonstances le justifient, la Fédération Française de Spéléologie contribue en partenariat avec les collectivités ou les propriétaires privés à mettre en place des procédures de limitation ou de contrôle d'accès. En dehors de ces cas particuliers, la FFS souhaite réaffirmer son attachement à un libre accès aux sites de pratique et s'opposer aux mesures d'interdictions injustifiées. La Fédération Française de Spéléologie rappelle qu'elle intime à ses membres de respecter scrupuleusement les réglementations en vigueur. Sauvetage aux Fontanilles à quatre mains Article goupillé à partir de deux publications : « Secours aux Fontanilles » par Jean-Pierre Baudu (CDS 42 - Commission plongée souterraine) Photographies : Robert BOURRIER (Spéléo-Secours de l'Hérault). Jean-Pierre : Nous sommes le lundi 3 juin 2001, je reçois un message sur mon portable, c'est Fabien Darne. La nouvelle tombe : un plongeur n'est pas ressorti de la grotte des Fontanilles. Depuis 2 ans, Frank Vasseur a repris les explorations dans cette cavité. Son but est de poursuivre l'exploration du S6, au-delà de son précédent terminus à –77m. Il met en route une grosse organisation. Connaissant bien Frank, ce qui prime c'est la sécurité à toutes les étapes du processus. Beaucoup de copains sont là pour lui donner un coup de main. c 'est l'occasion pour beaucoup de découvrir cette superbe cavité dont l'accès est réglementé. Les relations de Frank avec les pouvoirs publics, les chasseurs et les protecteurs de la nature, l'ont amené sur un terrain d'entente collectif. L'exploration se fera en plusieurs étapes. En février et mars 2000, nous préparons les bivouacs post siphon et nous acheminons des échelles en alu jusqu'au S6 (1100m) pour le franchissement d'escalades délicates avec des bouteilles de plongée. Je participe à deux plongées. La deuxième plongée, nous permet Frank, Medhi et moi de rejoindre le S6. Rares sont les personnes qui ont nagé dans ce magnifique lac. Quelques mois plus tard, Frank m'appelle pour me demander si je veux être le plongeur qui l'accompagnera au S6 et qui passera la nuit au bivouac, lors de la pointe. Pour moi, c'est un honneur. Bien sûr, j'accepte et me fais un plaisir de préparer mon duvet conditionné dans un sac étanche pour passer les différents verrous liquides. Seulement, le début de l'année 2001 commence très mal, tempêtes, pluies, inondations… Le moral de Frank est au plus bas. Nous avions une date butoir, mais le temps est resté pluvieux. Il prend la décision de reporter l'explo. à l'année suivante. Un créneau devrait être trouvé entre la chasse et les nidifications d'oiseaux protégés. Je sais d'avance que je serai dans les équipes du Spéléo-Secours. Je prépare, dès mon arrivée à la maison, des mélanges adaptés aux profils de la cavité. J'en profite pour appeler Frank, il vient d'apprendre que l'équipe de Douchet est partie pour une plongée dans le S6. Mardi, je retourne au travail, la tête n'y est pas. Les choses se compliquent le S.D.I.S. veut arrêter les recherches, trop dangereux. Il faudra toute la persuasion de Frank et les observations de l'équipe à Douchet pour reprendre les secours. 13 heures, Frank m'appelle. Il vient de poser ses conditions au SSF. Il ne laisse aucune négociation possible. Il m'annonce ma réquisition et me demande d'être son fusible, s'il ne peut pas plonger pour une raison quelconque dans le S6. Il me conditionne sur ce que l'on risque de trouver et me repose la question. J'accepte, bien sûr. J'ai 18 heures pour me concentrer et me préparer. C'est une pression énorme, je ne m'en rendrai compte seulement au retour. Pour l'heure, mon matériel étant prêt, je descends dans le sud. Trois heures plus tard, je retrouve une partie de l'équipe. Le reste de la journée nous permet de peaufiner notre préparation. Je dois rester concentré, il est difficile de comprendre à quel point la concentration est vitale. La cavité n'est pas technique mais elle est physique. Frank nous rejoint le soir, il a les traits tirés. Toute l'équipe n'est pas encore arrivée. Il manque 2 personnes qui préparent les mélanges pour la plupart de l'équipe. Ils arriveront tard dans la nuit. Le soir, nous nous restaurerons avec les pompiers. La mobilisation est énorme. Après le repas, le matériel est marqué et chargé dans les 4x4 des pompiers. Les spéléos terminent les portages vers 3 heures du matin. La nuit est agitée. Je réussis à dormir 4 heures. Il pleut la moitié de la nuit. Le réveil s'effectue vers 5 heures 30, il vient juste de s'arrêter de pleuvoir. Nous sommes inquiets. Petit déjeuner à Puéchabon avec des pompiers, Frank nous fait le brieffing. Nous devions être 10 mais un des plongeurs a trop mal dormi, il préfère ne pas prendre de risque. Il fera les vérifications de nos mélanges. Nous sommes donc 9 plongeurs. Frank a pris en compte le fait que certaines personnes aient des problèmes et qu'ils ne puissent pas continuer. Nous sommes nombreux, mais c'est la condition pour être sûrs qu'un plongeur puisse faire la recherche dans le S6. La piste pour atteindre la cavité est très défoncée par le passage des pompiers. Frank est à mes coté, nous ne nous parlons pas. Nous passons le barrage de sécurité. Le paysage est grandiose, nous attaquons la descente de 3 km dans les gorges de l'Hérault. Nous arrivons au parking, c'est le branle-bas de combat. Tous les plongeurs commencent à se préparer. Les personnes de l'équipe se connaissent bien, chacun connaît sa tâche et s'y prépare mentalement. Nous somme enfin face à la vasque du S1, il n'y a pratiquement que nous. Seuls quelques spéléo sont là pour nous aider dans les préparatifs. Le matériel, pour les besoins de l'intervention, est impressionnant. La grotte est illuminée par deux gros halogènes. Je suis prêt. J'en profite pour faire le vide une dernière fois. L'information de la météo nous rassure, grand beau temps pendant 48 heures. Nos premiers camarades commencent à plonger vers 8 heures. Frank : Il est 8 heures, nous entrons dans la grotte des Fontanilles. Aujourd'hui, mercredi 6 juin 2001, personne ne sourit, personne ne plaisante. Personne n'est pressé d'aller plonger. Nous nous mettons à l'eau comme on allait, en d'autres temps, à la mine. Pourtant la grotte est belle, exceptionnelle de puissance et de majesté. Pourtant cela fait à présent huit ans que nous y plongeons, et deux saisons que nous préparons une future plongée d'exploration dans le dernier siphon. Mais aujourd'hui, l'objectif est autre. Un plongeur s'est engagé dimanche matin dans le dernier siphon avec pour objectif de descendre le plus profond possible, peut-être jusqu'à 140m. Il n'en est pas ressorti. Dans la nuit de lundi à mardi, Marc Douchet, parti en reconnaissance a retrouvé à –40m dans ce sixième siphon, au milieu d'un fatras de fils d'Ariane détendus et sectionnés, le masque du disparu et du matériel visiblement abandonné en catastrophe. Mardi matin, une laborieuse réunion avec le directeur de cabinet du préfet et un sous-préfet aboutit au soutien des pouvoirs publics, alors qu'il était questions qu'ils abandonnent les recherches. Le Spéléo Secours Français envisage d'engager une équipe dans le S.6 afin d‘effectuer des recherches dans les plafonds, des fois que le disparu ait pu trouver refuge dans une cloche exondée jusqu'alors inconnue. Le SSF me propose d'effectuer cette « mission ». Nous nous lançons dans cette opération parce que nous gardons l'espoir de retrouver le disparu vivant. Mais nous savons aussi que « le pire » est possible. C'est aussi à cette éventualité qu'il faut se préparer. Pas facile, quand on n'est pas professionnel du sauvetage. C'est pourquoi mes conditions ne sont pas négociables : je veux neuf plongeurs avec moi (certains seront interchangeables en cas de problème. C'est une des applications du principe de redondance), c'est moi qui les choisis (des gens de confiance qui connaissent la cavité et ne prendront pas de risques), et nous plongerons au Nitrox (air enrichi en oxygène qui permet de limiter la saturation et sécurise ce genre de plongées préparées hâtivement, où le stress et la fatigue peuvent générer des problèmes de décompression). Devant le premier siphon, les préparatifs sont torrides. A la cavité d'ordinaire chaude (eau à 14°c) s'ajoute la tension du moment. Il a plu toute la nuit. Les prévisions météo arrivent : grand beau, aucun risque de précipitation. Un facteur de stress en moins, dans une source réactive aux orages. Nos 50 charges sont là, sur la berge, acheminées par les spéléos jusqu'à une heure fort avancée de la nuit. Christian DEIT, le catalan de la bande, analyse une dernière fois les nitrox. Un pourcentage trop élevé induirait des risques d'accident hyperoxique dans la partie profonde. Je suis avec Jean-Pierre Baudu, le stéphanois ardèchophile après avoir vainement tenté de « faire le vide ». Jean-Pierre a accepté, en connaissance de cause, d'être mon joker. C'est lui qui ferait la recherche dans le S.6 si je n'en étais pas capable. Derrière nous Mehdi Dighouth et Eric Julien, le tandem rigolus\tristus millavois et Richard Huttler, le photographe nîmois, suivront à 5 minutes d'intervalle. Tous connaissent la source des Fontanilles pour y avoir plongé dernièrement, lors des sorties préparatoires à notre projet d'exploration du S.6. Tous se connaissent. Tous sont des gens de confiance qui ne prendront pas de risque et n'ont rien à prouver, ni à aux-même, ni aux autres. Jean-Pierre. : Je plonge avec Frank, nous profitons de notre avance pour aller poser deux bouteilles d'oxygène pour les paliers de retour, à –6 mètres. Nous ajustons et nous vérifions notre matériel (4 bouteilles) et c'est parti. Le S1 et le S2 sont passés dans un temps record. Nous posons nos deux premières bouteilles, les copains nous aident à passer les palmes et prennent les bouteilles de Frank pour qu'il s'économise. Nous rejoignons le S4 et retrouvons le matériel pour la plongée du S6. Nous devons être 4 à rejoindre le S6, mais certaines personnes ont quelques problèmes. Nous attendons quelques minutes. Pendant ce temps, le reste de l'équipe rejoint le bivouac et installe un Nicola. Frank : Nous avons franchi les deux premiers siphons sans encombres. La visibilité avoisine les quatre mètres, presque les conditions habituelles. Une partie de l'équipe, celle qui restera devant le S.4, nous aide à acheminer notre matériel. Claude installe le téléphone, notre seul lien avec la surface. Devant le S.4, nous attendons encore 45 minutes. Mais derrière nous, le reste de l'équipe prévue jusqu'au S.6 se recompose. Des problèmes techniques ont eu raison de deux plongeurs qui préfèrent ne pas pousser plus loin. C'est Mehdi, le « joker » qui prendra leur place. Comme devant le S.1, le stress me gagne. Les idées, les images se bousculent. Il faut agir. Je croise le regard de Jean-Pierre. Connivence. Jean-Pierre. : Je romps le silence et propose à Frank de prendre les deux 12 litres, sans mot avec juste une complicité à toute épreuve, il arrache comme une plume le kit d'oxygène et s'enfonce dans le S4. Je sors du S4, la charge est lourde, un dernier pas avant le S5. La main de Frank se tend pour me soulager un peu. Sortie du S5, il me reste les portages des 12 litres pour permettre l'ultime plongée. Cela fait 2 heures 30 que nous nous sommes immergés. Medhi et Serge nous rejoignent enfin avec le matériel pour le point chaud. J'essaie de faire fonctionner le Nicola, en vain. Frank. : Devant le S.6, un tas d'affaires : celles du disparu. Amertume d'y découvrir des pages de mon inventaire plastifiées. Faut-il que ce document serve à ce genre de plongées-catastrophes ? Le téléphone en place ne fonctionne pas : aucun lien avec la surface. Jean-Pierre fait un aller-retour de portage jusqu'au S.5, puis Mehdi et Serge nous rejoignent. Nous terminons ensemble l'assemblage des bouteilles que j'endosse, debout dans la vasque. J'appréhendais particulièrement ce moment. Curieusement, je suis moins stressé. La fatigue de la progression (nous sommes à 1120m de l'entrée) se cumule aux deux précédentes mauvaises nuits. Il y a des chances pour que cette plongée soit la pire de ma vie (comme les plongées effectuées lors de sauvetages). Serge a commencé à monter le point chaud immédiatement au-dessus du siphon, Jean-Pierre et Mehdi, m'assistent dans les préparatifs. Le silence s'est fait autour de la vasque. Les regards se croisent. J'y lis une réconfortante confiance malgré l'inquiétude qui les noue également. Positiver. Rétablir les rythmes cardiaques et respiratoires. Apaiser l'esprit, autant que faire se peut. Je pense aux proches, trouver du réconfort. Ma future femme, que j'épouserai dans une quinzaine de jours, ma famille, les copains qui m'ont adressé leurs encouragements par téléphone : Jean-louis GALERA, le spéléo poète compagnon de tous les portages, Michel ENJALBERT avec qui j'ai débuté, Jean-Marc LEBEL, un copain de l'est, avec qui je partage certaines valeurs et un certain goût pour les explos et les compte-rendus ficelés. Et puis mon oncle, décédé il y a à peine deux mois, un homme fort et droit. J'imprime mentalement son image avant de changer d'élément. Jean-Pierre. : Nous aidons Frank dans sa préparation et c'est le départ. Avec Medhi, nous regardons les lampes disparaîtrent. Quelques bulles nous signalent qu'il est encore proche, et puis plus rien. Pendant que Serge prépare le point chaud, nous nageons dans la vasque du S6 pour rejoindre une petite presqu'île où nous nous installons. C'est un moment irréel où le temps ne passe pas vite et pourtant une impression de chevauchée infernale. Le cerveau est dans une espèce de coton mais toutes les hypothèses y passent. Frank : J'ai « fermé les écoutilles », arrêté de penser. Se concentrer. Déposer la bouteille d'oxygène à –6, accrocher ensemble les deux fils d'Ariane, alterner la respiration sur les détendeurs. L'étiquette 100, -21m. l'ancien fil est emberlificoté autour d'une écaille. Je l'amarre fermement. Le mien, équipé en 1997, plonge dans le puits. J'accroche celui de mon dévidoir et entame l'ascension. Je vais remonter jusqu'au plafond dans l'espoir d'y trouver une cloche avec le disparu dedans. Si la recherche est infructueuse, je descendrai à la base du puits, à –40, nettoyer les fils d'Ariane pour préparer le terrain d'éventuelles plongées profondes. J'accroche régulièrement le fil. Puis je risque subrepticement un œil vers « la suite ». Je redoute de me retrouver nez à nez avec une combinaison rouge surmontée d'un bi bleu. Aussi, je repère d'abord du coin de l'œil, puis inspecte plus assidûment. Heureusement, la visibilité (environ 2 à 3 m) me permettrait de garder un peu de distance avec les « évènements ». Je me décale régulièrement vers le sud, vers l'aplomb du puits. A –5, je bute sur un plafond. Vers le sud, j'arrive à –1, sous un nouveau plafond. Je suis en train d'amarrer le fil et je commence à progresser vers le sud lorsque j'aperçois les lumières d'un casque, agité sous l'eau. Il est vivant ! Et en état de réagir ! Son autre main bat la surface, je la saisis fermement et émerge en gueulant littéralement de soulagement dans mon détendeur. Il est là, hagard, flottant sur sa bouée. La fermeture de son vêtement, ouverte, est incrustée d'argile. Est-elle cassée ? Est-il resté ainsi à demi immergé ? A sa demande, je m'identifie. Le premier moment d'émotion passé, l'urgence s'impose : il est dans cette cloche confinée qu'il a trouvée par hasard et par miracle, depuis plus de 60 heures, sans nourriture. Il a consommé beaucoup d'oxygène et l'air s'est progressivement chargé en gaz carbonique, au point de devenir à peine respirable, comme je viens de le constater. Vite, il faut réagir ! A-t-il encore ses bouteilles ? Non, il n'a plus rien. Je l'assure de mon retour immédiat avec du gaz et replonge sans prendre le temps d'amarrer le fil d'Ariane dans la cloche. Je bloque le dévidoir au dernier amarrage et fonce vers la sortie. Jean-Pierre. : Enfin, quelques bulles, le bruit augmente jusqu'à devenir obsédant. Les lumières se déplacent très rapidement, elles font surface. Il nous faut quelques secondes pour sortir de notre nuage. La réalité nous revient en pleine figure. Nous avons du mal à rattraper Frank. Il est sous le choc. Il nous informe de la situation. Mugnier lui semble très mal en point (à faire peur). Il est dans une cloche avec un air complètement vicié. Le franchissement est de 120 mètres avec un point bas à -22mètres. Frank n'a pas observé d'indice d'accident de décompression. La combinaison étanche de Mugnier est ouverte. Nous ne pouvons pas le laisser dans cette cloche, il ne lui reste que peu de temps à vivre. Malgré cela nous savons qu'il risque de nous « claquer entre les mains » lors d'une nouvelle plongée. Le problème est que nous ne savons pas quel est son état réel et nous ne pouvons avoir de soutien de la surface. Frank. : En me voyant revenir de la sorte, les copains redoutent la mauvaise nouvelle. Je suis essoufflé et encore sous le choc de cette urgence qui nous tombe dessus, le soulagement aura été de courte durée. Il est vivant, mais affaibli, dans une cloche gazée où il dispose de moins de deux heures de survie. Nous ne pouvons l'y laisser plus longtemps. Ceci dit, en l'immergeant nous prenons le risque qu'il ne supporte pas la plongée (hypothermie, hypoglycémie ..etc), mais nous n'avons pas le choix. Nous devons l'évacuer de cette cloche : il faut le faire plonger. J'apprécie la présence des copains. La confiance que j'ai en eux m'apaise un peu. Il ne s'agit pas de crier victoire, elle est loin d'être acquise. Et la bataille que nous allons mener contre « la faucheuse » promet d'être serrée. Jean-Pierre. : Dans un premier temps, nous attrapons la nourriture qui nous était destinée et Frank décide de lui acheminer avec sa bouteille d'oxygène. Serge prête ses bouteilles pour évacuer la victime. Nous allons immédiatement les chercher avec Medhi. Frank : Immédiatement, Jean-Pierre envisage de repasser S.5 et S.4 pour annoncer la nouvelle au reste de l'équipe et surtout à la surface, via le téléphone afin d'activer l'équipe médicale. Serge accélère, il aura bientôt finalisé le point chaud. Mehdi retourne au S.5 chercher le bi 9l de Serge, le seul de cette capacité (nous n'avons que des 7l) équipé d'une bouée d'équilibrage. Il servira à rapatrier la victime. Serge se condamne ainsi à demeurer au S.6 en attendant qu'on lui apporte une bouteille pleine pour ressortir en sécurité. Avant de le faire replonger, nous allons mettre un maximum de chances de notre côté. Il faut le « retaper » autant que faire se peut. Je fouille ses affaires en quête de nourriture. Le butin est maigre : un tube de lait concentré à demi entamé, quelques rares barres énergétiques et … un cigare dans un étui étanche. J'enfourne ça, sauf le cigare, dans une pochette et y ajoute tout ce que j'ai : un tube de compote et un de crème de marron. Tant pis pour mon déjeuner. Je retourne rapidement le rejoindre, en récupérant au passage la bouteille d'oxygène. A –1, sous la cloche, j'attrape mon dévidoir. Il est là, au-dessus de moi, flottant sur sa bouée. Je crains, dans l'état où il est, un mouvement de panique de sa part. Là où il est, il m'empêche d'émerger. Sous l'eau, j'ouvre le robinet de la bouteille d'O2, dégage le détendeur et la met dans ses mains, qu'il agite sous la surface. Je m'assure qu'il ne risque pas de la lâcher, elle coulerait à –40. C'est bon, il s'éloigne. Je sors et le trouve en train de s'installer sur la berge. Il n'a plus de masque et il n'arrive plus à fermer sa fermeture étanche de son vêtement. En amarrant mon fil dans la cloche, je lui intime de respirer toute la bouteille d'O2 et d'avaler tout ce qu'il y a dans la pochette. Je coupe court lorsqu'il évoque des remords, et ordonne fermement de se nourrir et de respirer l'O2. Je refuse d'entendre parler du reste, ce n'est pas le moment. Je le prépare déjà psychologiquement à la plongée : je vais aller retourner chercher un bi 9l, il ne faut que 4 minutes pour franchir les 125m (en fait j'en annonce 80) qui nous séparent de la sortie, je vais l'aider à parcourir cette distance. La seule chose qui m'importe à présent est de le sortir vivant du mauvais pas dans lequel il s'est fourré. Il dispose d'une bonne demi-heure d'autonomie en oxygène. Je plonge à nouveau et en profite pour assembler au mieux les deux fils d'Ariane qui zigzaguent dans le siphon. Jean-Pierre : A son retour, Frank estime que Mugnier est mieux qu'à sa première visite, mais le risque de la ré-immersion est réel. Je laisse mes compagnons et me charge de prévenir le reste de l'équipe ainsi que la surface. Frank : Serge est au bord de la vasque, le point chaud est prêt. A l'intérieur, un hamac tendu, des bougies allumées. Mehdi arrive avec le bi. Je sors mon masque de secours de sa sacoche et le range dans une poche de ma stab : il sera plus aisément accessible. Nous envisageons diverses manières d'assister la victime durant la plongée et en choisissons une. Je veux être au clair, ne pas avoir à improviser, avoir d'avance une procédure en tête. Il y aura bien assez d'inconnues, de paramètres ingérables lors de cette immersion. Jean-Pierre : Je sors du S4, c'est le silence. J'appelle pour prévenir de ma présence, mais il n'y a aucun retour. Je rejoins la grande salle et commence l'escalade de l'éboulis. Je retrouve mes camarades inquiets de pas avoir de nouvelle. Je rassure, je raconte sans oublier un détail. Nous faisons la liste de ce que je vais raconter par le Nicola et commence à transmettre. Je ne sais pas le temps que j'ai passé au micro, mais cela était interminable. Je ne sais pas l'heure qu'il est et ne suis pas intéressé pour regarder. Frank : Difficile de définir mes sentiments. Je sais que j'ai à nouveau fait le vide, concentré sur l'équilibrage et le transport du bi 9l. En émergeant dans la cloche, il achève de se restaurer. Je tâche de le rassurer au mieux. Son calvaire est terminé. Dans 4 minutes, ce sera fini. S'il a 4 minutes dans sa vie où il faudra qu'il soit « zen », ce sera celles-là. A-t-il bien tout mangé ? Je me remémore une conversation téléphonique avec un médecin fédéral : « Après un repas, attendre au moins les 6 heures nécessaires à l'assimilation avant de faire replonger une victime ». Pas possible aujourd'hui. Il craint de ne pouvoir palmer : je vais l'aider à repasser. Pendant qu'il vide l'O2, je m'attelle à la fermeture de son vêtement, une fermeture étanche à mailles métalliques ouverte d'une épaule à l'autre. Ce genre de système doit impérativement être propre. Le moindre grain de sable est susceptible de la bloquer et d'empêcher son verrouillage. Là, il a dû l'ouvrir pour uriner. Dans l'impossibilité de la fermer seul, il s'est ensuite allongé dans l'argile. Tout le système est incrusté de glaise et de particules de roche. Je bataille presque un quart d'heure à essayer de la fermer. Sans succès. Je gratte, frotte à en percer mes gants, mouille et recommence encore. Que porte-t-il sous son vêtement ? Une fine combinaison néoprène humide (3mm) sans manches. J'ai consommé 20 bars sur une de mes bouteilles (je respire systématiquement sur mes bouteilles dans la cloche). Lui a vidé le flacon d'O2. Ne pas s'énerver, s'agiter inutilement. Nous sommes contraints à plonger ainsi, combinaison ouverte. Je réitère mes recommandations, sur un ton que j'espère rassurant, banalise les paramètres de la plongée en les minimisant (distance, profondeur), l'assure que c'est possible. « Si la tête tient, le corps tient » disait un jour un chirurgien dans une émission télévisée. Pour le corps, nous avons fait ce que nous pouvions (nourriture, O2). Reste à conditionner la tête. Il a conservé ses palmes et son casque. Je l'harnache du bi, fixe la ceinture, vérifie l'ouverture des robinets, positionne les détendeurs, les lui fais essayer. Mon masque de secours prend place sur sa tête, puis son casque. Deux lampes fonctionnent encore. La suite : le fil plonge presque verticalement à –21. Les premiers mètres sont un peu étroits, aussi je passerai le premier. Je le réceptionnerai à –21 puis le pousserai durant les 100m restants, jusqu'à la sortie. Allez, plus que 4 min et ce sera (presque !) fini. Il a un détendeur en bouche. Je récupère la bouteille d'O2 vide et plonge à –2. Il avait peur de ne pouvoir couler : une bonne traction sur ses chevilles et c'est parti. Nous filons rapidement, il ne faut pas traîner, le choc thermique doit être rude. Je stoppe de temps en temps, il me tombe dessus dans un nuage de touille. Ne pas perdre le contact. A la base de la verticale, je gonfle ma stab, le réceptionne et l'équilibre également. Vite, je pose sa main sur le fil. C'est lui qui le tiendra. Ca maintiendra sa vigilance et j'aurai une idée de son état de conscience, car je crains qu'il perde connaissance. La visibilité est ici de 3 mètres, je suivrai le fil des yeux en permanence. Cette fois, plus question de « fermer les écoutilles ». Je ne suis plus seul en jeu. Et de la sécurité de l'un dépendra inévitablement celle de l'autre. Une main sous son bras, l'autre sous le bi, et c'est parti. J'appuie sur les palmes. Souffler, expirer à fond, ne pas s'essouffler. Garder un rythme et une amplitude réguliers. Soudain, je le sens se contracter, il gémit. Non ! Pas maintenant ! Il a gardé la main sur le fil ; Je change de côté. L'obliger à rester conscient. Je l'encourage en permanence en criant dans mon détendeur, lui frappe l'épaule en signe d'encouragement, pousse un peu plus fort sur les palmes, positionne sa main sur le bon fil lorsque les deux se séparent. L'étiquette 50 passe, plus que la moitié. Positionné comme je le suis, de manière à le pousser, je déborde de l'espace de progression. Un de mes flexibles s'accroche à la roche. Je suis stoppé net, impossible de me dégager. Obligé de le lâcher pour me décrocher. Mais il s'est mis à palmer et je le rattrape quelques mètres plus loin pour reprendre notre « tandem ». L'étiquette 20 apparaît. Nous sommes sous la vasque. Je manifeste vocalement que c'est fini, serre sa main, le fait émerger. C'est presque gagné. Il faut encore passer sous une voûte basse pour atteindre le « débarcadère ». Une dernière poussée, puis Mehdi le déséquipe prestement et l'aide à remonter le ressaut où Serge le hisse d'une poigne vigoureuse et le sort de sa combinaison. Il est choqué, tremble de tous ses membres et a du mal à tenir sur ses jambes. Il n'aurait pas fallu que la plongée soit beaucoup plus longue … En moins de temps qu'il ne faut pour le dire, il est au point chaud, allongé dans le hamac, déshabillé, empapilloté dans des couvertures de survie, nourri et hydraté. Pour ma part, j'ai « donné ». Physiquement (ça se gère) mais surtout psychologiquement (plus dur). J'ai besoin de souffler, aussi, pendant que Serge et Mehdi restent au point chaud, je fais trois portages jusqu'au S.5 pour rapporter et reconditionner toutes mes bouteilles et celles de Serge. Jean-Pierre : Je décide de retourner au S6 pour aider l'équipe du fond. On essaie de faire le bilan des bouteilles pouvant me servir. Nous en trouvons deux qui sont rapidement acheminées au S4, alors que les miennes retournent au S2. Je réquisitionne pour le secouru, la nourriture que mes camarades n'ont pas engloutie. Je n'ai toujours pas mangé. Je retrouve avec soulagement Mugnier dans un hamac au chaud. Il a le regard hagard et il est très tendu. Je raconte ce que j'ai demandé au PC. B. Gauche ne devrait pas tarder. Mugnier s'alimente. Nous restons encore une bonne heure à déconner, nous sommes tous soulagés. Puis, c'est le départ pour Frank, Medhi et moi. Sur le chemin du retour, Frank s'assied pour prendre son souffle. Il porte le bi de Serge. C'est l'occasion pour moi de tout savoir. Je crois que c'est le moment le plus privilégié. Les regards en disent long, ces 30 min de repos sont indescriptibles : une réelle complicité. Frank : Jean-Pierre revient aux nouvelles. Il a transmis les informations à la surface, la suite des opérations s'organise. Le médecin, arrive par hélicoptère. Des plongeurs compétents sont réquisitionnés dans tout l'hexagone. Nous demeurons au point chaud encore une bonne heure, le temps que l'état de la victime s'améliore. Ses tremblements de froid s'atténuent, il se relâche et discute. Il est temps, pour nous, d'évacuer. Serge attendra avec la victime au point chaud l'arrivée de l'équipe médicale. Jean-Pierre : Nous retrouvons le S5. La fatigue se fait sentir. Nous devons redoubler de vigilance. Je n'ai pas mon matériel personnel, un détendeur n'est pas bien réglé et j'ai tendance à me mélanger. Nous partageons les charges, 2 bouteilles de 12 litres et le kit oxygène avec le petit matériel. Nous sortons la tête du S4, l'équipe nous attend. Ils nous portent le matériel au S2. C'est l'embouteillage. Frank décide de prendre son temps (je le soupçonne de garder un œil sur le reste des plongeurs). Medhi est le premier prêt. j e le suis. A la sortie du S1, lors des paliers à l'oxygène, nous sommes pris de grelottements. Nous sortons, une caméra nous espionne. J'ai l'impression qu'elle nous vole ce que nous venons de vivre pendant ces 10 heures. Les gestes sont lents, comme à la sortie du sommeil. Les bruits sont différents, on me prend mon matériel. J'ai envie de leur dire de me laisser tranquille, mais ils font leur travail. Je retrouve le coin où je me suis équipé. Mes gestes sont toujours aussi lents, je regarde l'animation qui m'entoure. J'ai l'impression d'être dans une autre dimension. Un œil me tourne autour, il veut quelque chose, puis le porteur de l'œil me dit « bon, on fait une interview », c'est le retour brutal sur terre. Trouvant qu'il n'y a pas beaucoup de porteur, je sors mon bi 7 litres. Un médecin hyperbare me pose quelques questions sur mon état général et me laisse continuer mon chemin. La fin de journée est très douce. j e croise les porteurs qui me reconnaissent et me manifestent leur reconnaissance. Les odeurs de la nature me paraissent plus fortes que ce matin. Toute l'équipe se retrouve à ma voiture. t out c'est superbement déroulé, c'est l'essentiel. En remontant la piste, nous croisons une équipe, c'est la relève pour notre camarade resté avec la victime. Pour Frank, c'est une soirée active avec de multiples interviews. Je rentre le lendemain, et je retrouve mon chez moi avec plaisir. Je croise ma femme pour lui souhaiter son anniversaire, je suis vidé. Frank : Nous retrouvons le soleil après 10h30 passées sous terre. L'opération n'est pas terminée pour autant. La victime sera évacuée jeudi soir et les plongées de déséquipement se prolongeront jusqu'à vendredi matin. Certains plongeurs passeront plus de 20 heures et des nuits blanches sous terre, ainsi que les équipes spéléo et la direction du secours. La source des Fontanilles a été fermée et interdite la semaine suivant le sauvetage. |
Eric, Serge et Richard
Franc Vasseur, concentration avant plongée
Frank et Christian
Jean-Pierre Baudu
Jérôme dans le siphon
Ligne de bouteilles
Mehdi et Eric
Plongeurs autour de la remorque SSH
Serge au compresseur
Serge Préparation nourritures pour point chaud
Vérification des mélanges
Vue d'ensemble des plongeurs
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